Le 22 juillet 2025, sur le tarmac bouillonnant du salon aéronautique d’Oshkosh dans le Wisconsin, un petit biplace français a décroché un graal industriel : la certification FAA Part 23, délivrée par la redoutable Federal Aviation Administration. Derrière ce jargon se cache un sésame stratégique. Ce tampon officiel permet désormais à Elixir Aircraft, entreprise née à La Rochelle, de vendre librement son avion aux États-Unis.
Cela faisait cinq ans que le modèle était certifié en Europe (CS-23 depuis 2020). Pourtant, tant que la FAA ne validait pas l’appareil, impossible de pénétrer le plus gros marché mondial de l’aviation générale. Les équipes françaises ont donc travaillé avec méthode, patience et un soupçon d’obstination. Les derniers essais en vol, supervisés par les inspecteurs américains au printemps 2025 à La Rochelle, ont été décisifs.
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Elixir Aircraft : la start-up gauloise s'attaque aux Etats-Unis
Dès l’annonce de l’homologation, les lignes téléphoniques de l’atelier rochelais ont commencé à crépiter. Cirrus Aviation, école de pilotage basée en Floride, a signé pour douze avions. Sierra Charlie Aviation, en Arizona, prévoit cent appareils pour renouveler intégralement sa flotte de formation. Et au total, ce sont plus de 300 précommandes et lettres d’intention qui ont été enregistrées aux États-Unis.
En comparaison, la flotte européenne actuelle compte 40 avions livrés et une soixantaine en commande. Autrement dit, le marché américain a le potentiel de multiplier la production d’Elixir par dix. Un changement d’échelle qui impose quelques ajustements logistiques.
Une implantation américaine calibrée pour durer
Pour répondre à cette demande exponentielle, un centre opérationnel est en cours d’installation à Sarasota, en Floride. Il regroupera les services de vente, de formation, de maintenance et de gestion des pièces détachées. Cette base locale permet de rassurer les opérateurs américains et de garantir une disponibilité rapide des avions et des pièces.
L’objectif est clair : devenir un acteur durable, pas un feu de paille. Il ne s’agit pas seulement de vendre des avions, mais de les accompagner tout au long de leur vie opérationnelle. Ce niveau de service est attendu, voire exigé, sur le marché américain. Et Elixir semble bien décidé à s’aligner.

Une philosophie de conception taillée pour les écoles
Dès le départ, Elixir Aircraft n’a pas voulu bricoler autour d’un ancien concept. Le modèle de quatrième génération a été pensé comme un outil pédagogique, simple à piloter, simple à entretenir, et surtout rentable. Sa cellule monocoque est entièrement moulée en matériaux composites, une première à ce niveau de gamme. Pas de rivets, pas de corrosion, moins de pièces mobiles. Ce choix réduit les coûts de maintenance et augmente la durée de vie.
Autre point-clé : la consommation. L’Elixir ne boit pas plus de 9 litres à l’heure, contre 30 litres pour un avion école classique. Cela représente une réduction de carburant de près de 70 %, soit un gain économique direct pour les exploitants. Le coût horaire d’exploitation est ainsi descendu sous les 60 dollars, un argument massue dans un contexte où le prix du carburant flirte avec des sommets.
Un positionnement en phase avec les défis du secteur
Depuis la pandémie, les écoles de pilotage peinent à recruter des instructeurs et attirer des élèves. Les compagnies aériennes annoncent des pénuries de pilotes à venir, et les formations doivent s’accélérer tout en restant accessibles financièrement.
Dans ce contexte, un avion moins gourmand, plus fiable et écologique attire l’attention. Il colle aussi aux exigences des nouveaux contrats de formation financés partiellement par des aides publiques, notamment aux États-Unis. Pour les écoles, passer à l’Elixir, c’est réduire leur impact carbone sans compromettre la sécurité ni la qualité pédagogique.
Une ambition assumée à l’échelle mondiale
Arthur Léopold-Léger, président et cofondateur d’Elixir Aircraft, l’assume sans détour : “On ne fait pas tout ça pour rester dans notre coin”. Selon lui, cette certification FAA est le tournant stratégique qui permettra à l’entreprise de devenir un acteur global de l’aviation légère.
Les chaînes de montage, installées près de La Rochelle, tournent désormais à flux tendu pour honorer les commandes en cours. De nouvelles lignes sont envisagées pour soutenir la cadence, avec des recrutements à la clé. La dynamique enclenchée pourrait également intéresser l’armée française, qui recherche de nouveaux avions pour ses formations de base.
Résumé chiffré :
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Éléments |
Données |
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Certification FAA |
Obtenue le 22 juillet 2025 |
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Commandes aux États-Unis |
Plus de 300 intentions |
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Commandes en Europe |
Environ 60 en attente |
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Avions déjà livrés |
40 unités |
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Consommation carburant |
9 litres/heure |
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Réduction par rapport à un avion école classique |
70 % |
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Coût d’exploitation horaire |
Moins de 60 dollars (environ 55 euros) |
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Centre opérationnel américain |
Sarasota, Floride |
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Écoles partenaires |
Cirrus Aviation (12 avions), Sierra Charlie Aviation (100 prévus) |
Source : Elixir Aircraft



