Dans la forêt de pins du nord de la Gironde, un projet industriel se distingue par son ambition autant que par sa méthode. L’usine d’assemblage du LCA60T, futur géant des airs, n’est pas un hangar comme les autres.
Elle a été conçue selon une démarche itérative, scientifique et bio-inspirée. À la base : une forme paramétrique, ajustée progressivement grâce à des algorithmes génératifs. Ces outils simulent des contraintes physiques, structurelles et climatiques pour faire émerger une géométrie qui répond à son environnement. Autrement dit, la forme suit la fonction, mais aussi le climat, le terrain, le vent.
Chaque itération affine les rapports entre matière, structure et paysage. Le résultat ? Une réduction de 50 % de l’acier utilisé par rapport à des hangars industriels conventionnels.
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Flying Whales va créer toute une filière du dirigeable à Laruscade
Le site comptera deux grands types de bâtiments.
D’une part, des structures logistiques dont l’architecture a été pensée pour s’effacer dans le paysage. D’autre part, deux halles principales, imposantes par leurs dimensions mais adoucies par leurs silhouettes ondulantes.
Ces formes, inspirées de la nature, cassent la linéarité typique des hangars classiques. Leur hauteur est visuellement absorbée par un jeu de courbes, ce qui les rend peu perceptibles depuis les abords.
Ce n’est pas qu’un choix esthétique. Cette morphologie permet aussi une meilleure gestion thermique, une ventilation naturelle et une insertion paysagère sobre. La structure devient ainsi un partenaire du territoire, et non un intrus.
Des concepteurs atypiques pour un site hors-norme
Le projet a été confié à un groupement audacieux.
On y trouve les architectes de GAAMMA (Goudchaux Architecte & Associés) et Mamou-Mani, connus pour leurs travaux sur l’impression 3D et les structures paramétriques. Le bureau d’études Terrell assure l’ingénierie. Le tout est piloté par la SEML Route des Lasers, entité publique-privée bien connue en Nouvelle-Aquitaine pour ses projets technologiques.
Le mot d’ordre ? Sobriété globale.
Réduction des matériaux, optimisation des ressources, attention au cycle de vie des composants, le tout pour aboutir à un bâtiment à faible empreinte environnementale.
L’enquête publique, organisée à l’été 2025, a abouti à un avis favorable. Une étape clé vers le lancement officiel des travaux, prévu pour début 2026.
À l’intérieur du géant : 80 kilomètres de tubes composites
Le LCA60T est un dirigeable aux dimensions XXL : 60 tonnes de charge utile, des dizaines de mètres de long, des contraintes mécaniques comparables à celles d’un pont suspendu… mais en l’air.
Pour supporter ces efforts, une structure mixte métal-composite a été développée. Le composite, plus léger que l’aluminium, permet de gagner du poids sans perdre en résistance. Le tout est assemblé sous forme de poutres treillis, capables d’absorber les charges de portance, d’accélération, de propulsion ou même les tensions internes liées au ballast.
Il faudra plus de 80 kilomètres de tubes en composites pour assembler un seul exemplaire. Pour ceux qui préfèrent les repères concrets : cela représente la distance Bordeaux–Angoulême, en matériaux tressés à la main ou presque.
Des essais de charge grandeur nature
Avant d’entrer en production, chaque innovation structurelle est passée au crible.
Les tests de jonction principale ont déjà eu lieu. Les essais sur les poutres treillis en carbone débuteront en novembre 2025 au laboratoire du CTA (Centre de Transfert Aéronautique). Une maquette à l’échelle 1/3, soit un assemblage de 15 mètres par 15 mètres, est en préparation avec les équipes de DGA Techniques Aérospatiales.
Les premiers essais de chargement dynamiques sont prévus pour début 2026. Ils permettront de vérifier que la structure peut encaisser toutes les contraintes d’un vol réel, sans déformation permanente ni rupture.
Une filière dirigeable ancrée dans le territoire
La Zone d’Activité Économique (ZAE) de Laruscade n’est pas un parc industriel comme les autres. C’est un écosystème tourné vers l’assemblage et les essais de dirigeables. Une spécialité de niche, mais avec un potentiel considérable.
Le projet est soutenu par la Région Nouvelle-Aquitaine et la Communauté de Communes Latitude Nord Gironde. Leur ambition ? Créer une filière aéronautique complète autour du vol lent, propre, logistique ou scientifique. En clair, le territoire ne se contente pas d’accueillir une usine. Il se structure pour produire, tester, former et innover.
Une ambition industrielle, des retombées locales
À l’échelle nationale, le programme s’inscrit dans la Nouvelle France Industrielle, initiative destinée à relocaliser des chaînes de valeur stratégiques. À l’international, il fait de la France l’un des rares pays capables de produire des dirigeables lourds de nouvelle génération.
300 emplois directs sont attendus sur le site, auxquels s’ajouteront autant en indirect : maintenance, logistique, ingénierie, services, etc. Des partenariats avec des centres de formation locaux sont prévus pour constituer des viviers de compétences.
L’objectif est clair : faire émerger une filière complète, capable d’alimenter les besoins civils (fret aérien, missions scientifiques) comme militaires (surveillance, transport stratégique).
Prochaines étapes :
– Fin 2025 : obtention des autorisations administratives
– Début 2026 : démarrage des travaux de construction
– 2027 : premiers essais d’assemblage des structures du LCA60T
Fiche technique syr le LCA60T
| Caractéristique | Valeur | Détail |
|---|---|---|
| Nom du modèle | LCA60T | Dirigeable cargo semi-rigide |
| Charge utile maximale | 60 tonnes | Transport de matériel lourd ou hors gabarit |
| Longueur totale | ≈ 200 mètres | Comparable à deux terrains de football |
| Volume de gaz porteur | ≈ 200 000 m³ | Hélium utilisé pour la portance |
| Structure interne | Mixte métal-composite | Plus de 80 km de tubes composites |
| Vitesse de croisière | ≈ 100 km/h | Idéal pour la logistique longue distance |
| Autonomie | ≈ 1 000 km | Dépend de la configuration charge/carburant |
| Altitude opérationnelle | 2 000 à 3 000 mètres | Évite les couloirs aériens commerciaux |
| Émissions CO₂ | Très faibles | Comparé au fret aérien classique |
| Applications prévues | Logistique, secours, énergie | Transport d’éoliennes, modules isolés, secours humanitaires |
| Construction | Début 2026 | Sur le site de Laruscade (Nouvelle-Aquitaine) |
| Essais structurels | Fin 2025 - Début 2026 | Avec DGA et CTA (poutres carbone, jonctions principales) |
