Cette ville de Nouvelle-Aquitaine ressuscite et va relancer une filière vitale pour l'armement de la France : la production de poudre

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Bergerac, la renaissance grâce à la poudre : quand l’artillerie relance une ville entière.

Cette ville de Nouvelle-Aquitaine ressuscite et va relancer une filière vitale pour l'armement de la France : la production de poudre
Cette ville de Nouvelle-Aquitaine ressuscite et va relancer une filière vitale pour l'armement de la France : la production de poudre

Des chaînes de production en continu, des CV qui affluent et une ville qui revit : à Bergerac, la poudrerie Eurenco ne fait pas que produire de la poudre. Elle souffle un vent d’optimisme sur toute une région. Relocaliser la fabrication d’explosifs, en 2025, ce n’est pas seulement une affaire de souveraineté militaire : c’est une stratégie économique à combustion rapide.

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Une usine qui explose les compteurs

Jusqu’en 2022, l’usine Eurenco de Bergerac ressemblait à un vestige d’un autre temps. La poudre y avait disparu depuis deux décennies, remplacée par des importations venues d’Allemagne, de Suède ou d’Italie. Mais le climat géopolitique a changé. Avec la guerre en Ukraine et le désengagement progressif des États-Unis, l’État français a tranché : il faut produire en France. Et vite. Résultat : 1800 tonnes de poudre propulsive devraient bientôt sortir chaque année des chaînes de production. Une montée en cadence spectaculaire, qui s’accompagne d’une multiplication des effectifs par deux d’ici 2026.

De 200 salariés, on passerait à près de 500 emplois directs, sans compter les 500 à 750 emplois indirects selon les estimations de la direction. 

Qui est Eurenco ?

EURENCO, fondée en 2004, est un leader européen des matériaux énergétiques, spécialisé dans la production de poudres, explosifs et propulseurs pour les secteurs de la défense, de l’aérospatial et des applications civiles. Avec un chiffre d’affaires de près de 500 millions d’euros en 2024 et 1 700 employés répartis sur ses sites en France (Bergerac et Sorgues), Belgique et Suède, EURENCO joue un rôle clé dans la souveraineté industrielle européenne. 

Une institution centenaire qui renaît

La poudrerie de Bergerac est un véritable repère de l'industrie de l'armement française. Elle a traversé les guerres, les restructurations, les gels budgétaires. Mais aujourd’hui, elle redécolle, portée par un investissement massif de plusieurs dizaines de millions d’euros et l’appui des ministères des Armées et de l’Économie. Le 20 mars 2025, les deux ministres sont venus eux-mêmes inaugurer la nouvelle ligne de production. Avec en glien de mire une fabrication de poudre pour obus de 155 mm, ceux-là mêmes utilisés dans les obusiers automoteurs CAESAR, "roi des canon" en service notamment en Ukraine.

Avec cette relance, la France retrouve une capacité stratégique qu’elle avait perdue. Et Bergerac retrouve un avenir industriel.

Une économie locale sous adrénaline

Le retour de l’activité industrielle s’accompagne déjà de signes visibles dans le centre-ville. Près de 500 nouveaux habitants se sont installés à Bergerac depuis l’an dernier. Un chiffre qui ne doit rien au hasard. Car avec un site qui devrait bientôt tourner 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, les besoins en personnel sont loin d’être comblés. Derrière ces chiffres, c’est tout un tissu économique qui frémit.

Un enjeu stratégique bien au-delà de Bergerac

Si le projet Eurenco attire l’attention, ce n’est pas uniquement pour ses retombées locales. Il incarne un virage industriel à l’échelle nationale. En restaurant une production stratégique sur le sol français, l’État anticipe des conflits longs, des tensions durables, et surtout un besoin d’indépendance.

Ce réarmement n’est pas synonyme de militarisation aveugle, mais de soutien à une filière industrielle française qu’on avait laissée s’endormir. Et Bergerac devient, presque malgré elle, le symbole de cette relance.

L'armement, une filère économique de 220 000 salariés en France 

La filière de l’armement en France représente un secteur stratégique avec un chiffre d’affaires annuel estimé entre 25 et 30 milliards d’euros, dont 35 % proviennent des exportations. Elle regroupe environ 4 500 entreprises, principalement des PME, et emploie directement 220 000 personnes. La loi de programmation militaire (2024-2030) prévoit un investissement de 413 milliards d’euros, soit une augmentation de 40 % par rapport à la période précédente, pour moderniser les équipements militaires. En 2024, la production d’obus de 155 mm a atteint 100 000 unités, marquant une montée en cadence pour répondre aux besoins croissants. Les exportations ont également atteint un record de 18 milliards d’euros en 2024 grâce à des produits phares comme les avions Rafale.

En Nouvelle-Aquitaine, la filière aéronautique et spatiale joue un rôle clé dans l’industrie de défense. La région abrite des acteurs majeurs tels que Dassault Aviation et Thales, spécialisés dans les avions de combat et les systèmes électroniques militaires. Ces entreprises bénéficient des investissements nationaux pour renforcer leurs capacités, notamment dans le cadre des projets liés à la souveraineté technologique et à l’innovation militaire.

 

Source : https://presse.economie.gouv.fr/nar-deplacement-deric-lombard-et-de-sebastien-lecornu-a-bergerac-jeudi-20-mars-2025