Il n’y a ni vitrail ni clocher. Pas de prière, pas de cloître.
Et pourtant, ce récif est une véritable cathédrale vivante, posée à 20 mètres sous la surface, là où la lumière hésite à pénétrer.
On l’a trouvée dans les eaux du Pacifique Sud, au large des îles Salomon et est tellement immense que d'après certains médias il serait possible de la voir depuis l'espace ! Bon c'est probablement un peu exagéré comme nous allons le voir mais ses dimensions en font toutefois l'un des être vivant les plus massifs sur notre planète.
Lire aussi :
- 10 ans que cet animal nuisible mais comestible a atteint la Méditerranée, la France est-elle prête à en manger pour en freiner l'expansion ?
- Avec 46 000 ans, cet animal bat le record absolu de longévité sur terre (en dehors de quelques arbres et champignons) mais il a bénéficié d’un peu « d’aide »
La découverte du plus grand récif coralien du monde, tombée du ciel... ou presque
C’est un explorateur de National Geographic, Manu San Félix, biologiste marin et vidéaste, qui est tombé dessus l'an dernier.
Il cherchait une épave. Il a trouvé un géant.
“C’était comme entrer dans une église sous-marine. Une émotion immense. Un être vivant, immobile depuis des siècles.”
Lui-même, pourtant habitué aux récifs, en a eu le souffle coupé.
34 mètres de large, 5,5 mètres de haut : un monument de corail
Cette colonie géante appartient à l’espèce Pavona clavus.
À elle seule, elle mesure 34 mètres de large, 32 mètres de long et près de 6 mètres de hauteur. Autrement dit, plus grande qu’une baleine bleue adulte et si le récif n'est probablement pas visible depuis l'espace (ou alors avec une belle loupe), il reste digne d'une cathédrale gothique !
Ce n’est pas un récif au sens classique, fait de dizaines de colonies. Ici, c’est une seule entité, une immense communauté de polypes tous connectés, comme les cellules d’un même corps.
Un monstre paisible, couvert de minuscules bouches, abritant des crevettes, des crabes, des poissons-coffres et des anges de mer.
Et pourtant, personne ne l’avait encore cartographiée.
Sommet d’une énorme colonie de Pavona clavus, presqu'aussi massive que celle découverte près des îles Salomon.
Un miracle caché dans les profondeurs fraîches
Le récif a été découvert en eau profonde, dans une zone plus fraîche que les hauts-fonds coralliens classiques.
Et c’est peut-être ce qui lui a sauvé la vie. Tandis que les récifs de surface blanchissent à cause de la chaleur, cette colonie-là est restée protégée, stable, vivante.Dans le même secteur, des coraux proches sont morts en masse ces dix dernières années, brûlés par des vagues de chaleur océanique.
Mais elle, elle tient bon.
Un monument de résistance dans un océan qui change trop vite et un vrai symbole d'espoir.
Un trésor à protéger… dans un pays dépendant du bois
Les îles Salomon ne sont pas seulement un paradis pour les plongeurs.
Elles sont aussi un haut lieu de la biodiversité corallienne. Plus de 490 espèces recensées. Le deuxième plus grand réservoir au monde, juste après l’Indonésie.
Mais ce paradis est en équilibre fragile.
Le déboisement massif pour l’exportation du bois (jusqu’à 70 % des recettes nationales) entraîne des coulées de sédiments. L’eau se trouble. Les jeunes coraux étouffent.
Et même les géants, comme celui-ci, pourraient un jour succomber au silence si rien n'est fait.
Un sanctuaire millénaire dans un monde qui s’éteint
Le corail géant est une archive vivante.
Chaque couche, chaque ramification raconte un siècle de croissance lente, de tempêtes passées, de courants marins oubliés.
Alors que 44 % des espèces de coraux tropicaux sont désormais menacées d’extinction, ce colosse paisible nous rappelle ce que nous risquons de perdre.
Pour rappel : en 2008, seules un tiers des espèces étaient menacées. Aujourd’hui c'est presque une sur deux.
Le réchauffement, la pollution, la surpêche, les maladies : les attaques sont multiples et nos réponses pour le moment inadaptées si nous voulons que de telles merveilles nous survivent pour voir un jour nos petits enfants...
Image : Gizo, îles Salomon
