... protégés de transformations ou de destructions malheureuses. Du château de Bridoire en Dordogne à la villa Leihorra en Pays basque, des arènes de la course landaise aux haras de Pau, des châteaux viticoles médocains aux chapelles de pénitents du Lot-et-Garonne, ce sont autant d’histoires qui concourent à l’élaboration d’un récit collectif.
Ce hors-série, réalisé avec le ministère de la Culture, s’attache à restituer la parole d’acteurs intimement concernés par l’aventure patrimoniale, propriétaires privés, entrepreneurs ou artisans. Le succès croissant des Journées du Patrimoine atteste de l’intérêt constant du public pour le riche héritage patrimonial que nous ont légué les générations précédentes. Il revient à notre génération de l’entretenir et de l’enrichir à son tour, en y projetant une attention nouvelle : celle-ci, toujours respectueuse du passé, s’applique à rendre le « Monument historique » plus intelligible, plus accessible, en phase avec notre époque.
* La loi du 31 décembre 1913 est venue compléter et modifier les précédentes dispositions prises en 1887, en instaurant l’instance de classement et en définissant le cadre et le statut des Monuments Historiques. Elle prévoit également une nouvelle mesure de protection, l’inscription à l’Inventaire supplémentaire, remplace la notion d’intérêt national par celle d’intérêt public et porte atteinte pour la première fois au droit de propriété en étendant le classement à la propriété privée. Cette protection revêt deux formes : classement parmi les Monuments Historiques ou inscription sur l’inventaire supplémentaire des Monuments Historiques. Plusieurs fois modifiée et complétée, elle s’applique aussi bien aux éléments mobiliers qu’immobiliers, et reste la base de notre législation actuelle. Elle a également servi de modèle à travers le monde, dans des pays soucieux de la protection de leur patrimoine culturel.
Editorial de Xavier Rosan
En 2004, la revue le festin publiait son tout premier hors-série, L’Aquitaine monumentale, en partenariat avec la conservation régionale des Monuments historiques d’Aquitaine. Presque dix ans plus tard, ce nouvel opus, qui paraît à l’occasion du centenaire de la loi de 1913, est l’occasion de revenir sur l’évolution de la notion de « monument historique » et sur ce qu’elle recouvre. La loi du 31 décembre 1913 constitue un acte juridique de toute première importance, dans la mesure où elle garantit la préservation des patrimoines artistiques dans leur diversité. Elle étend les mesures de protection aux biens privés et crée une nouvelle catégorie de protection : l’inscription sur la liste de l’« inventaire supplémentaire ».
À l’intérêt exceptionnel, national, se substitue l’intérêt public. Cette loi a par ailleurs prouvé ses capacités d’adaptation, d’une part en intégrant trente ans plus tard la protection des abords des monuments historiques, d’autre part en faisant évoluer la notion même de patrimoine susceptible d’entrer dans son champ d’application. Aux « monuments mégalithiques » et aux « terrains qui renferment des stations ou gisements préhistoriques » cités dans l’article 1er, aux églises, châteaux, théâtres romains ou fortifications qui figuraient dans la première liste de 1840, se sont ajoutés des maisons de plaisance, des éléments du patrimoine industriel, de l’architecture contemporaine ou encore des jardins. Si ce dispositif législatif a essuyé de nombreuses critiques en raison des contraintes qu’il impose nécessairement, il s’avère au demeurant un outil des plus vertueux.
Outre son objet premier, qui consiste à sauvegarder le patrimoine, à en préserver la qualité artistique dans la perspective d’en assurer sa transmission aux générations futures, il génère des retombées économiques non négligeables, en particulier au travers de l’attractivité touristique. Aujourd’hui, l’Aquitaine compte environ 2 800 monuments historiques, dont un quart de classés. Ce corpus est représentatif des différentes phases qui ont marqué le mouvement au niveau national, mais il se distingue également par la reconnaissance de protections propres à l’identité culturelle des territoires.
C’est ainsi que sont inscrits ou classés plusieurs arènes dans les Landes, d’anciens hauts fourneaux et des forges liés à l’industrie du bois, des villas balnéaires, des domaines viticoles, des gabares, des pinasses et des bateaux de pêche, des phares, mais aussi des sites de grands pèlerinages ou tout un ensemble d’immeubles et d’objets du patrimoine religieux juif. En définitive, rien de ce qui est humain ne semble pouvoir échapper au regard patrimonial
Le concept éditorial ? ...
.... Pratique, esthétique et accessible
Une introduction sous forme d’interview avec Alain Rieu, conservateur régional des Monuments historiques à la DRAC Aquitaine, ainsi qu’un abécédaire des Monuments historiques permettent de contextualiser les sujets-clés liés aux Monuments Historiques et aux politiques de protection au patrimoine.
Le corps principal du hors-série repose sur le développement de sujets transversaux ou monographiques, permettant d’offrir un panorama de l’ensemble des domaines, époques, types des sites et d’édifices concernés par l’intervention des Monuments Historiques.
Richement illustré, ce hors-série offre des repères et clés de compréhension au plus grand nombre.
Sommaire - Sujets Monographiques
LANDES
Sol y sombra sur les arènes des Landes, par Christelle Foulquier
Bien que répondant à une typologie spécifique, les arènes landaises ont su affirmer leur individualité au travers de leur disparité. Mais ce patrimoine traditionnel, pittoresque et attachant, demeure d’une grande fragilité. Arènes de Roquefort, Amou, Bascons et Dax.
Le patrimoine industriel des Landes, par Aurélie Fournier-Merle
L’intérêt récent apporté au patrimoine lié au monde du travail et à l’évolution des techniques s’inscrit dans le mouvement actuel d’extension de la protection du patrimoine. Ainsi depuis une quinzaine d’années, les sites industriels landais de Luxey, Uza ou Brocas ont fait l’objet de protections spécifiques.
DORDOGNE
Le château de Bridoire et la loi de 1913, par Aurélie Fournier-Merle et Alain Rieu
Menacé de vandalisme, le château de Bridoire, à Ribagnac, jadis haut lieu huguenot, a été sauvé de la ruine grâce à l’intervention volontariste de l’État, constituant un exemple extrême d’application de la loi de 1913. Aujourd’hui superbement restauré par ses nouveaux propriétaires, il revit et est régulièrement ouvert au public.
Le chemin de croix de Léon Zack à Carsac-Aillac, par Muriel Mauriac
Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, art roman et art contemporain dialoguent dans la petite église de Carsac-Aillac, en Périgord Noir, grâce à l’émouvant Chemin de Croix réalisé par le peintre d’origine russe Léon Zack.
Cabinet scientifique du lycée impérial de Périgueux, par Francis Gires
La collection d’objets scientifiques du lycée Bertran de Born de Périgueux se présente comme un étonnant cabinet de curiosités. Ce patrimoine méconnu témoigne des échanges entre savants et constructeurs qui ont fait la réputation des instruments français. Il révèle, en outre, tout un pan de l’histoire de l’enseignement scientifique.
GIRONDE
La vie de château en Médoc, par Nicole Siffert
Le terme de château viticole, spécifique à la région bordelaise, se développe à partir du xixe siècle. Le domaine viticole reprend alors les caractéristiques des maisons nobles qu’il adapte aux besoins de l’exploitation. C’est ce que nous montre l’enivrante route des châteaux en Médoc.
Le renouveau des casernes
Dès 1757, sous Louis XV, fut envisagée la construction d’une caserne militaire destinée à abriter les logements des troupes de Libourne. Ensemble architectural unique en son genre dans la région, les casernes Lamarque et Prouteau suscitent aujourd’hui un grand intérêt patrimonial.
BÉARN
L’église anglicane de Pau, par Gil Guérin
Par son architecture et son précieux décor, l’église Saint-Andrew, toujours ouverte au culte, témoigne de la position substantielle que tint la colonie anglaise à Pau à la fin du xixe siècle.
PAYS BASQUE
Leihorra bleu, blanc, or, par Benoît Manauté
Célèbre pour l’homogénéité et la qualité d’un décor destiné à magnifier l’épure d’une construction typiquement Art déco, la villa Leihorra avait subi, au fil des décennies, d’importants dommages. Longtemps abandonnée à un triste état de délabrement, cette demeure d’exception a retrouvé aujourd’hui tout son lustre.
Sommaire - Sujets Transversaux
Rêves de papiers peints, par Philippe Maffre
Utilisés comme revêtements muraux dès le XVIIe siècle, les papiers peints attestent des raffinements d’un certain art de vivre. Par définition fragile et périssable, cet art décoratif, longtemps considéré comme mineur, fait aujourd’hui l’objet de vigilantes mesures de protection.
Et vogue le navire (le patrimoine maritime), par Noël Gruet
Région littorale, l’Aquitaine est riche d’un patrimoine maritime et fluvial navigant des plus variés, représentatif des usages qui en ont nourri l’histoire. Bateaux de pêche ou de plaisance, ils bénéficient, depuis une trentaine d’années, d’une reconnaissance salutaire, dont la protection au titre des Monuments historiques constitue souvent un enjeu déterminant de leur sauvegarde.
Le patrimoine religieux de la deuxième moitié du xxe siècle, par Hervé Brunaux
Si la part des édifices religieux protégés demeure relativement minoritaire eu égard à l’ensemble des monuments patrimoniaux dont le projet de sauvegarde a été officiellement acté, l’audace architecturale qui a caractérisé certaines constructions paroissiales d’après-guerre a néanmoins fait naître le désir d’un effort en direction de leur préservation. Rapide parcours des plus représentatives de la seconde moitié du siècle passé.
Le patrimoine réligieux juif en Aquitaine, par Dominique Jarrassé
Synagogues, objets de culte ou cimetières, le patrimoine religieux juif fait aujourd’hui l’objet de protections mais aussi de restaurations importantes. Reste à réaliser une mise en valeur de cet ensemble exceptionnel pour lui restituer la place qu’il mérite dans l’histoire régionale.
Sentinelles de la mer (les phares), par Nicole Siffert
Si plusieurs phares aquitains ont aujourd’hui perdu leur vocation première, ils demeurent des repères patrimoniaux marquants. Cinq d’entre eux ont été récemment protégés au titre des Monuments historiques.
Peintures murales : les restaurations du défi, par Dominique Peyre
Exposées à l’usure du temps et aux « changements de décor », les peintures murales constituent le fragile épiderme des édifices. Parvenues jusqu’à nous dans un état souvent lacunaire, leur conservation comme leur mise en valeur posent de multiples et délicats problèmes.
Des pierres et des hommes en Lot-et-Garonne (demeures privées), par Éric Leurent
Se lancer dans la restauration d’un édifice chargé d’histoire n’est pas anodin. En Lot-et-Garonne, les châteaux de Blanquefort, Combebonnet et Prades ont habité des familles de propriétaires autant que ceux-ci les ont investis lors de chantiers exemplaires et fédérateurs. Ces véritables aventures humaines ont pu être accomplies grâce à la loi de 1913 sur les Monuments historiques, qui a su poser les fondations d’un système particulièrement riche en dispositifs de protection du patrimoine monumental.
Les chemins vers la spiritualité, par Dominique Peyre
Les sites de pèlerinage Verdelais, Bétharram, Sarrance Les critères de protection concernant les lieux de pèlerinage restent toujours sensibles à l’intérêt historique et artistique des sites. Mais, depuis quelques temps, ils prennent également en compte des notions plus globales et contextuelles, incluant une compréhension des lieux et des hommes.
Pénitents bleus et blancs, par Dominique Peyre
Par leur esprit de responsabilité et leur pouvoir dans l’espace social, les Pénitents bleus et les Pénitents blancs se démarquent du monde religieux. Les blancs demeurèrent à Villeneuve-sur- Lot jusqu’en 1937. Leur chapelle de confrérie conserve un ensemble d’objets liturgiques remarquables qui témoigne de leur autonomie.
La visite aux haras de Gelos, par Joëlle Deyres
Par son architecture, son décor et ses aménagements, par son environnement paysager et sa collection de voitures hippomobiles, le haras de Gelos conserve le souvenir prégnant de la culture du cheval à Pau.
La grotte ornée de Cussac, par Nathalie Fourment
Douze ans après sa découverte, la grotte ornée et sépulcrale de Cussac s’affirme comme un terrain exceptionnel pour la recherche préhistorique en raison du caractère monumental des gravures préhistoriques qui s’y trouvent et de la présence de vestiges humains. Le travail conjoint mené par les services de l’État et l’équipe de recherches a pour vocation d’approfondir la connaissance du site et mieux en assurer la pérennité.
Jardins avec vue sur Dordogne, par Joëlle Deyres
Entre nature et culture, le parc et le jardin d’eau du château de La Roque, à Saint-Germain-la-Rivière, dialoguent harmonieusement avec la vallée de la Dordogne dans la tradition des jardins français du xviiie siècle.
LE FESTIN - Revue & éditions d'art en Aquitaine - http://www.lefestin.net