Le Festin#91 - Spécial Art Déco

.... ce mouvement à la croisée des genres. L’illustration est à l’avenant, qui s’appuie sur la richesse du bâti, des objets ou des arts graphiques, y compris par le truchement populaire de la réclame. Car autant qu’à un style, c’est à une époque, voire même à un art de vivre que le festin ouvre ses pages.

La formule de l’abécédaire a été retenue pour mieux dépeindre le foisonnement de cette période d’exception pour les savoir-faire « à la française ». Esthétique épurée, lignes simplifiées, formes géométriques se propagent dans les provinces françaises. Ainsi, Bordeaux ou Pau ont bénéficié, grâce à l’entregent de maires bâtisseurs, de grands travaux municipaux qui sont parvenus à imposer une nouvelle monumentalité urbaine sans Hiatus avec l’héritage du passé. Il s’agit avant tout de rajeunir « l’image » de la ville, ce qu’ont tenté d’entreprendre plusieurs stations thermales comme Dax, Salies-de-Béarn ou Cambo-les-Bains.

À Biarritz, Saint-Jean-de-Luz, Hendaye-Plage, Anglet, Hossegor, Le Pyla ou Le Cap-Ferret... la vie balnéaire s’organise selon un rituel désormais immuable, du golf au casino, de la plage à l’hôtel ou à la maison de villégiature, chacun rivalisa d’élégance pour incarner la nouvelle société des loisirs. C’est cette ambiance particulière que ce numéro tout à fait exceptionnel du Festin, composé par l’historien de l’art Dominique Dussol, tente de restituer. Rompant avec la morosité ambiante de notre époque, laissons nous donc entraîner sans retenue dans la turbulence des Années folles.

L'Edito de Xavier Rosan

Y a d’la joie ! bonjour, bonjour les hirondelles...
e époque ? L ’Art déco est un peu tout cela à la fois. Entre 1919 et 1939, d’une guerre mondiale à l’autre, cette parenthèse de vingt ans se présente comme un intermède enjoué, trépidant, nourri de promesses. Cette période d’entre-deux-guerres nous a d’ailleurs légué quelques marqueurs prégnants, notamment dans les domaines de l’architecture, de la mode et du design. Après Paris et avant d’étendre son rayonnement dans le monde, l’Art déco a été aussi aquitain.

À sa manière et sans négliger les expressions régionales, le Sud-Ouest a en effet largement contribué à cette vague euphorisante, initiée par l’Exposition internationale des Arts décoratifs et industriels modernes de 1925.

C’est cette ambiance particulière que ce numéro tout à fait exceptionnel du festin , composé par l’historien de l’art Dominique Dussol, tente de restituer, sous forme d’un abécédaire en 28 entrées qui proposent de revisiter Bergerac, Biarritz, Bordeaux, Morcenx, Pau ou encore Villeneuve-sur-Lot... au temps des Années folles.

Oscillant entre avant-garde et « retour à l’ordre », architectures, peintures, sculptures et arts décoratifs constituent un patrimoine attrayant que l’on redécouvre aujourd’hui avec un œil neuf et un intérêt grandissant : le succès de la récente exposition parisienne « Quand l’Art déco séduit le monde » en témoigne.

Indissociables de ces enjeux esthétiques et stylistiques, de nouveaux paris sociétaux et culturels se mettent en place : l’automobile, les réclames, les concours d’élégance, les salles de spectacles, le tourisme et les congés payés, la femme émancipée ou le confort moderne... autant de mutations qui traduisent un formidable appétit de vivre en ouvrant grandes les portes de la modernité.

De cette époque contrastée, où les ouvriers côtoient la gentry sur les plages de Biarritz, où l’on célèbre dans chaque commune et avec une ferveur partagée les morts au champ d’honneur et où l’argent coule à flot dans les casinos (puis vient à manquer au moment de la crise), les Aquitains, comme l’ensemble des Français, semblent avoir tiré une leçon : profiter du moment présent et apprécier les plaisirs de la vie.

Rompant avec la morosité ambiante de notre époque, laissons-nous donc entraîner sans retenue dans la turbulence des Années folles.