... l’ébouriffant hôtel conçu par les architectes de l’atelier King Kong et le designer Philippe Starck. Ce lieu chargé d’histoire s’est ouvert en grand aux objectifs de la rédaction du magazine.
Dans ce numéro, le périple est aussi temporel, tant les séjours aux bois, à la mer ou à la campagne ont transformé la région à travers les siècles. Notre sélection témoigne d’un mouvement d’abord aristocratique (le futur Henri IV et la reine Margot, entraînant toute une cour à goûter aux plaisirs champêtres, à Nérac), devenu phénomène bourgeois (les villas « de cure » de la Ville d’Hiver d’Arcachon). Dans le sillage des têtes couronnées, des rentiers fortunés, des capitaines d’industrie, puis des artistes ou de grands couturiers, tel Jean Patou au Pays basque, ont édifié de somptueuses demeures. Dès le xixe siècle, des villes entières, telle Pau « l’Anglaise » ou Hossegor « l’élégante », se sont également lancées à corps perdus dans la concurrence touristique internationale, quand, de nos jours, des domaines ancestraux de Dordogne ont été convertis en auberges de charme.
Pour le plaisir - Editon de Xavier Rosan
De l’italien villegiatura, désignant un séjour à la campagne, s’est imposé le terme français de « villégiature », lequel, au xix e siècle, désigne des vacances à la montagne, puis aux bords de mer, prisées par l’aristocratie de l’époque. Le principe d’un dépaysement du corps et de l’esprit hors du cadre quotidien avait trouvé ses prémisses avec les Cours itinérantes que, depuis Charlemagne, rois et princes de France initiaient, pour causes économiques ou politiques, mais aussi par plaisir, durant de longs mois, dans les villes et les villages du pays. C’est ainsi que le futur Henri IV et la reine Margot s’installèrent à Nérac pour une saison d’agapes et de galanteries venant clôturer six ans pour le moins tumultueux.
Des « vacances » qui s’étalèrent sur plusieurs années, entraînant la modification en demeures et sites de plaisance de nombreux châteaux et jardins de l’Albret. Mais la villégiature moderne, préfigurant les vacances actuelles, trouve son origine dans l’avènement des loisirs et de la médicalisation, concomitant au développement des transports, qui innerve tout le xix e siècle. La création de stations thermales, puis balnéaires modifie profondément l’aménagement du territoire.
Au «voyage aux Pyrénées», favorisant la création de « villes d’eaux » telles que Les Eaux- Bonnes ou Les Eaux-Chaudes, dont les ablutions sont préconisées pour la guérison des maux de poitrine, succède l’engouement pour l’air balsamique ou marin d’Arcachon, puis de Biarritz, intronisée reine des plages». Entre-temps, ses qualités climatiques vantées par le Dr Taylor, attirant de fortunés hivernants britanniques, auront fait de Pau, quasiment, une « ville anglaise ».
D’initiatives aristocratiques – Napoléon III et Eugénie rayonnant dans les Pays de l’Adour depuis Biarritz, Edouard VII chassant le renard à Pau, Alphonse XIII prenant ses quartiers au Grand Hôtel d’Arcachon –, ces séjours à la montagne ou à la mer ont gagné les faveurs de la haute bourgeoisie.
Dans le sillage des têtes couronnées, rentiers fortunés ou capitaines d’industrie, puis artistes ou grands couturiers tel Jean Patou, ont édifié des demeures somptuaires, pour eux-mêmes ou leurs épouses, leurs filles ou leurs maîtresses, tandis que des équipements de luxe destinés à recevoir les visiteurs de passage (hôtels, restaurants) ou les divertir (établissements de bain, casinos) contribuaient à édifier des villes nouvelles sur des sites distingués par leur vue exceptionnelle (sur l’océan, sur les Pyrénées).
Il reste en Aquitaine de magnifiques témoignages de ce mouvement de société qui fut aussi, aux XIXe et XXe siècles, un mouvement de constructions intense. Menacé jusque dans les années 1990, ce patrimoine est aujourd’hui reconsidéré, protégé parfois, restauré souvent. Une reconnaissance que l’on doit, en grande partie, au travail pionnier qu’effectua, en Aquitaine, Jean-Claude Lasserre et le service régional de l’Inventaire, avec l’Institut français d’architecture.
Gironde
Les rêveries urbaines du Mama Shelter par Delphine Costedoat
Dans les années 1930, le nouveau siège de la Régie du gaz de Bordeaux, tout en verre, métal et béton armé, agace les puristes.Finalement délaissé, le lieu devient pain bénit pour l’équipe Starck-Trigano et l’atelier d’architectes King Kong, chargés de décliner le ton « Mama » et revitaliser l’hôtellerie en centre ville. Visite guidée d’un lieu déjà mythique.
Du nouveau au Café du Levant
Après une minutieuse cure de jouvence, la grande brasserie de la gare a rouvert en janvier. L’occasion de redécouvrir cette institution, l’un des derniers exemples encore vivants du patrimoine Art nouveau à Bordeaux.
Les villas Ormières d’Arcachon par Bertrand Charneau
Le père devint maire d’Arcachon, le fils établit le plan de la Ville d’Hiver de la cité balnéaire, le petit-fils assura de nombreux chantiers de reconstruction dans la Gironde d’après 1939-45… Si les lignées d’architectes ne sont pas rares, Eugène, Marcel, puis Max Ormières
s’illustrent par l’ampleur et la divinité de leurs réalisations. Leur point d’ancrage : Arcachon, où Marcel Ormières, notamment, imagina le modèle de la villa de cure.
Pays basque
Abbadia, villégiature romantique par Viviane Delpech
Le domaine d’Abbadia a des allures de landes irlandaises, ce qui décida Antoine d’Abbadie d’Arrast, érudit, infatigable voyageur, astronome réputé né à Dublin, à l’acquérir. En 1852, il passa donc commande d’un château à l’architecte Viollet-le-Duc, sous la direction duquel Edmond Duthoit concevra toute la décoration et le mobilier. Une demeure d’exception, consacrée à la contemplation sur un site enchanteur.
La villa Berriotz à Bassussarry par Benoît Manauté
Le très chic couturier et parfumeur des Années folles Jean Patou inaugura en 1925, à Biarritz, une succursale de son atelier parisien. Séduit par la région, il fit l’acquisition d’un terrain au Bois de Berriotz, surplombant la vallée de la Nive, afin d’y faire construire sa nouvelle résidence de villégiature. La villa, désormais classée au titre des Monuments historiques, est le chef-d’oeuvre de l’architecte-décorateur Louis Süe.
Landes
Les abris nature de Patrick Maxwell par Marc Saboya
Quand l’audace architecturale réside dans la simplicité : ainsi pourrait-on résumer le travail de Patrick Maxwell, véritable précurseur à la trop courte carrière. Avec ses demeures parfaitement intégrées dans leur écrin naturel, l’homme privilégiait l’économie de moyens, ébauchant avant l’heure les principes d’une architecture « verte ». Co-fondateur du mouvement Agora, il laisse derrière lui des créations seventies empreintes de l’esprit des lieux investis.
Le Haut-Regard d’Hossegor par Éric Martinez
La villa Haut-Regard témoigne de la naissance d’Hossegor. Enchâssée dans la forêt, la belle bourgeoise se distingue par sa tour d’angle conçue pour offrir un aperçu de la mer par-delà les futaies. Aujourd’hui, la villa retrouve une seconde jeunesse grâce à l’ajout d’une extension contemporaine aux formes radicales.
Les beaux soirs de la villa Saint-Jean par Bertrand Charneau
Dans l’arrière-pays landais, la villa Saint-Jean est un ancien corps de ferme réhabilité par les frères Gomez, alors connus pour leurs réalisations côtières Art déco. Tout à la fois basque, landaise et espagnole, la villa est un concentré d’influences campé sur la rive d’un fleuve, l’Adour, célébré par les plus grands poètes.
Lot-et-Garonne
La cour en villégiature à Nérac par Xavier Pagazani
Nérac fut, durant quelques années de paix au coeur des guerres de religion, le théâtre d’une cour brillante dont les membres ont cherché le repos et l’agrément dans les jardins de demeures d’exception. Château de Lagrange-Monrepos et château de Bournac.
Dordogne
Trois demeures converties en auberges par Line Becker et Vincent Marabout
De la capitale du Périgord aux rives de la Vézère où afflue le Coly, jusqu’au val de Dronne, à deux pas de la Charente, trois étapes hors des sentiers battus pour faire le plein des sens et des nourritures terrestres. Château du Mas-de-Montet à Petit-Bersac, castel Peyssard à Périgueux, hôtellerie de la commanderie à Condat-sur-Vézère.
Béarn
Pour en finir avec les « villas anglaises » de Pau ? par Claude Laroche
Pau et ses villas anglaises : d’une réalité historique certaine, on est passé ces dernières années à un cliché quelque peu envahissant... Voici trois villas paloises, soit autant d’occasions d’aller au-delà des idées reçues, pour mieux comprendre une architecture ô combien savante et tout sauf univoque. Villa Sorrento, villa Nitot et villa Béatrix.
Pau, le pari des parcs et jardins par Jean-Yves Puyo
Sous la Monarchie de Juillet, c’est avec hardiesse que Pau, cité indolente, devient une « station » à la mode. À l’image de la Côte d’Azur, la capitale béarnaise choisit de s’équiper en parcs et jardins. De l’arrivée des premiers hivernants étrangers aux tout derniers chantiers, Pau n’a, depuis, plus jamais cessé de verdir.