.... ruralité, santé de la mère et de l’enfant, technologies innovantes – et diverses valeurs peuvent alors entrer en conflit.
Le questionnement éthique peut ainsi se placer à différents niveaux : individuel, collectif (institutions et associations), législatif, sociétal et politique. Des valeurs individuelles peuvent s’entrechoquer, par exemple le principe de bienfaisance face aux contraintes économiques. La question de la mise à disposition de ressources collectives par les filières sanitaires et sociales peut se poser et avec elle le principe de justice : à qui et comment appliquer ces ressources, sur quels critères avec la question de leur légitimité ? La manière dont le cadre législatif et politique peut/doit contenir et prévenir le développement de la précarité nous place face au problème de la coordination de la lutte contre la pauvreté au niveau national comme au niveau international. Quels constats, quels contextes, quels questionnements éthiques, quelles modalités de lutte contre les effets de la précarité sur la santé et quelles difficultés rencontrées par les acteurs du terrain, quelles perspectives ?
Ce sont toutes ces questions qu’explorera ce colloque sur le thème de la précarité et de l’égalité de l’accès aux soins, proposé par la coordination des Espaces de Réflexion Ethique de la Nouvelle-Aquitaine, constitué des Espaces de Réflexion éthique de la région Poitou-Charente, d’Aquitaine (EREA) et du Limousin (ERELIM). Cette journée propose de décrire dans un premier temps les différents contextes de précarité, d’en mettre à jour les déterminants, de faire ressortir les moyens d’action et de comprendre les blocages à la réduction des situations précaires et d’inégalité d’accès aux soins.
Dans un deuxième temps, c’est le thème de la migration qui sera développé puis celui de la précarité de l’accès au soin des personnes en situation de grande pauvreté. Le dernier temps du colloque sera consacré à l’impact des nouvelles technologies de l’information sur ce problème majeur : amélioration du service rendu ou frein à l’accès aux thérapies innovantes ?
Des intervenants venant de différents horizons, dans le souci de l’interdisciplinarité, tenteront de faire vivre un débat autour de cette thématique, pour le grand public ou les professionnels devant faire face à ces problématiques de précarité.
La précarité et l’égalité de l’accès aux soins mettent en tension et portent à leur paroxysme deux visions des sociétés occidentales contemporaines :
- une vision centrée sur les aspects marchands où, la primauté étant accordée à la liberté d’entreprendre et de créer des richesses, les personnes sont reconnues, rémunérées et assistées à l’aune de leur rentabilité et de leur performance.
- une vision privilégiant les aspects humanistes où la recherche du bien-être et l’épanouissement des potentialités de chacun sans distinction de nationalité et de culture sont aussi au cœur des préoccupations individuelles, institutionnelles et politiques.
La reconnaissance en France d’un droit à la protection de la santé prend son origine dans l’alinéa 11[1] du préambule de la constitution de 1946 et se décline ainsi dans la loi du 4 mars 2002, à l’article L. 1110-1 : « Le droit fondamental à la protection de la santé doit être mis en œuvre par tous moyens disponibles au bénéfice de toute personne. Les professionnels, les établissements et réseaux de santé, les organismes d’assurance maladie ou tous autres organismes participant à la prévention et aux soins, et les autorités sanitaires contribuent, avec les usagers, à développer la prévention, garantir l’égal accès de chaque personne aux soins nécessités par son état de santé et la meilleure sécurité sanitaire possible. »
Le cadre législatif français garantit le même accès aux soins pour « toute personne », les étrangers sont donc concernés, les démunis aussi. Et pourtant, l’expérience du terrain confronte les acteurs des structures sanitaires et sociales à une toute autre réalité. La précarité peut en effet prendre plusieurs visages et toucher des migrants, le monde rural ou carcéral, les mères et leurs enfants…
[1] L’alinéa 11 du préambule de la Constitution du 26 octobre 1946 proclame que : « la loi garantit à tous, notamment à l’enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé »