Ce long métrage franco-roumain qui est soutenu par la Région Nouvelle-Aquitaine et accompagné par ALCA (Agence Livre, Cinéma et Audiovisuel en Nouvelle-Aquitaine) est à l’affiche ce mercredi 4 janvier 2023.
« Radio Metronom » s’est vu décerné de nombreux prix : celui de la Meilleure réalisation dans le cadre du Festival de Cannes 2022, celui du Meilleur film au Festival du Film Juif de Jérusalem, au Festival du Film de Gijon en Espagne et à l’Istanbul Crime and Punishement.
Synopsis
Bucarest, 1972. Ana, 17 ans, rêve d’amour et de liberté. Un soir, alors qu’ils font la fête avec ses amis, ils décident d’envoyer une lettre à Metronom, le programme musical que Radio Free Europe diffuse clandestinement en Roumanie. C’est alors qu’arrive la Securitate, la police secrète de Ceausescu...
Avec Mara Bugarine - Șerban Lazarovici - Vlad Ivanov - Mihai Calin - Andreea Bibiri - Alina Brezunteanu - Mara Vicol
Réalisateur Alexandru Belc
Alexandru Belc est né en 1980 en Roumanie. Il est diplômé de l’Ecole de cinéma de Bucarest en 2007 et obtient un master en sciences politiques en 2012. Pendant ses études, il réalise plusieurs courts métrages et documentaires. Il travaille ensuite en tant qu’assistant réalisateur pour Corneliu Porumboiu et Cristian Mungiu. Il est scripte sur le tournage de 4 MOIS, 3 SEMAINES ET 1 JOUR de Cristian Mungiu, Palme d’Or en 2007. Son premier long-métrage documentaire, 8 MARS, qui traite de la place des femmes dans le monde du travail, est présenté dans de nombreux festivals internationaux en 2013. Son deuxième long-métrage documentaire, CINÉMA MON AMOUR, portrait d’un exploitant art et essai roumain, sort dans les salles françaises en mai 2017. RADIO METRONOM, son premier long métrage de fiction, est en sélection officielle Un Certain regard au festival de Cannes 2022.
Note d’intention du réalisateur
Genèse
Mon projet initial était de réaliser un documentaire sur les années 1970 en Roumanie et en particulier sur Metronom, une émission diffusée clandestinement par Radio Free Europe, animée par le journaliste et producteur de radio roumain en exil, Cornel Chiriac, assassiné à Munich en 1975. J’ai mené des recherches qui m’ont plongé dans la vie des adolescents en Roumanie à cette époque, celle de la jeunesse de mes parents.
Je trouve que la période post-1968 est la plus intéressante de l’ère communiste, car c’était une époque de grandes contradictions sociales et culturelles. Les jeunes écoutaient tous Metronom, qui était pour eux une fenêtre ouverte sur le monde occidental. Aujourd’hui, alors qu’un simple clic nous permet d’avoir accès à tout et n’importe quoi, nous oublions souvent comment était la vie sous un régime autoritaire, quand il était si difficile de trouver un vinyle à écouter ou un bon livre à lire. Les gens écoutaient secrètement Radio Free Europe, qui était interdite. Ils vivaient des vies recluses, ils se retrouvaient clandestinement dans des appartements, pour danser et écouter de la musique ensemble.
Ana
Mon projet a évolué, il est devenu une fiction sur une fête qui tourne mal, dont tous les participants se retrouvent arrêtés et interrogés par la police politique, la Securitate.
J’ai décidé de raconter cette histoire du point de vue d’une adolescente, Ana, amoureuse d’un garçon, Sorin, qui quitte le pays pour de bon. Le scénario est peu à peu devenu le réceptacle des émotions intimes d’Ana, et s’est recentré sur son personnage. Tous les plans du film la suivent de près, c’est elle qui nous fait découvrir ce monde innocent fait de musique, de liberté, d’adolescence et d’amour. Ana est présente dans toutes les scènes, dans chaque moment du film, pour que nous puissions voir le monde à travers son regard. Si une scène commence sans elle, elle finit avec elle, et vice-versa.
Mon film est finalement devenu une histoire d’amour, une fiction sur le passage à l’âge adulte, une histoire de tromperie, de trahison et de pardon.
La mise en scène
Le scénario a évolué quand nous avons trouvé les acteurs principaux, les dialogues ont été adaptés pour que chacun puisse exprimer son individualité et sa personnalité. Puis nous avons fait d’autres changements quand nous avons trouvé les lieux de tournage, construit les décors et déterminé un plan précis de tournage. Notre but était de transmettre l’authenticité et la véracité des personnages et des situations. Le conflit, le communisme, le langage, les dialogues, la musique, la danse et la chorégraphie, tous ces éléments rentraient en ligne de compte.
Nous avons cherché à donner au spectateur la sensation d’être plongé dans les années 1970 par les décors, les costumes, les coiffures. Nous avons utilisé d’anciens objectifs et filmé sur pellicule argentique en 35mm.
Nous avons tourné caméra à l’épaule, pour suivre les personnages dans de longs plans complexes qui révèlent progressivement les individualités de chacun et qui confèrent une atmosphère et un rythme particuliers à l’histoire. Nous voulions que les personnages se révèlent petit à petit à l’écran, pour que le spectateur puisse les comprendre et s’identifier à eux. Les mouvements de caméra nous guident dans leur monde, tels qu’ils le perçoivent.
La musique et le montage
Pour que les scènes de fête soient aussi réalistes que possible, nous avons choisi de tourner les moments de danse avec de la musique directe sur le plateau, ce qui a aidé les acteurs à se mettre dans l’ambiance et à avoir un jeu plus authentique. La musique n’a pas été ajoutée ultérieurement en postproduction. Je pense que cette approche est essentielle pour le réalisme du film et la justesse des acteurs, même si cela représentait un vrai défi pour le montage, car nous avions moins d’options. Néanmoins, ce choix nous a aidés à trouver la durée, l’ambiance et l’énergie appropriées. Dans la mesure du possible, nous avons essayé d’utiliser des chansons en entier, et à faire correspondre la durée des scènes et des chansons. Par exemple, on entend « Light My Fire » des Doors en intégralité, durant une série de scènes importantes, pendant plus de 9 minutes. Nous avons aussi utilisé un mélange de chansons roumaines et internationales, des chansons locales assez méconnues et des grands succès des années 1970.
Avec la monteuse, nous avons ensuite essayé de trouver un bon équilibre pour l’histoire, le rythme général et, surtout, de construire le film sur une série de micro-ellipses, afin d’écarter tous les instants qui ne font pas avancer l’histoire. La longueur de chaque plan a été réduite en conséquence, pour composer la narration et mettre en avant l’histoire et les personnages. Ces courtes ellipses nous ont aidés à nous concentrer sur l’histoire du personnage principal, à suivre Ana de près et à nous rapprocher intimement d’elle.