L'église abbatiale, avec ses peintures murales millénaire est le bâtiment le plus ancien. Dans les bâtiments monastiques du XVIIe se trouvent les cellules des moines, le réfectoire, la salle capitulaire, l'escalier monumental, le jardin monastique et le logis de l'abbé. L'audace technique et créative mises en œuvre au cours des siècles ont fait de l'abbaye de Saint-Savin un lieu magique et unique. Mais elle a su et sait encore aujourd'hui évoluer avec son temps afin de répondre aux attentes des visiteurs.
Dans aucun pays, je n'ai vu de monument qui méritât au plus haut degré l'intérêt d'une administration amie des arts. Si l'on considère que les fresques de Saint-Savin sont à peu près uniques en France, qu'elles sont le monument le plus ancien de l'art de la peinture dans notre pays, on ne peut balancer à faire des sacrifices même considérables pour les sauver.
1845 - Prosper Mérimée, inspecteur des Monuments Historiques
L’abbaye de Saint-Savin est un trésor exceptionnel. Elle compte le plus grand ensemble de peintures murales d'Europe des XIe et XIIe siècles. Les espaces à visiter forment un ensemble architectural unique, regroupant des bâtiments du XIe et du XVIIe.
Une histoire marquée par de grands hommes
Entre légende et histoire, il est difficile de relater les vraies origines de Saint-Savin. D'après la tradition, au Ve siècle, deux frères -Savin et Cyprien- ont fui la péninsule italienne pour échapper aux Romains qui leurs reprochaient leur croyance chrétienne. Ils ont finalement été martyrisés près de la Gartempe. Dans les années 800, Baidilius, clerc palatin à la cour de Charlemagne, aurait fondé une église pour abriter les reliques retrouvées de Savin et Cyprien. Charlemagne serait à l'origine du lieu fortifié qui protège l'Abbaye.
Son fils, Louis le Pieux, roi d'Aquitaine puis empereur, pria Benoît d’Aniane d’établir 20 moines dont il choisit l’abbé. Placée sous la protection royale et régie selon la règle de saint Benoît de Nursie (règle bénédictine), l’Abbaye joua un rôle de premier plan dans l’histoire de la christianisation du Poitou. Dès le IXe siècle, elle accroît ses possessions à l'intérieur mais aussi en dehors même de son territoire.
L’Abbaye occupe alors une place éminente dans un monde monastique en plein renouveau. Les religieux de Saint-Savin réforment des lieux comme Saint-Martin d’Autun, Baume-les-Messieurs, Vézelay. L’un d’eux est même devenu abbé de Cluny. Au XIe siècle, la communauté bénéficie de la protection des comtes du Poitou. En 1010, la comtesse Aumode, épouse du duc d'Aquitaine Guillaume le Grand, fait don d'une importante somme d'argent à la communauté des moines qui reconstruit son abbatiale.
Au début du XVIIe siècle, l'Abbaye est aux mains des abbés laïcs qui la transforment en carrière de pierre et font disparaître les ailes médiévales sud et ouest.
Si l’église romane est parvenue jusqu’à nous, les bâtiments conventuels n’ont pas pu résister aux ravages causés par les Guerres de Religion. Au XVIIe siècle, une congrégation de moines mauristes envoyée à Saint Savin par le Roi engagea de grands travaux et reconstruit le bâtiment conventuel (1682-1692). La Révolution française voit le départ des derniers moines et le service de la paroisse se trouve transféré à l'abbatiale en 1792.
En 1833, le préfet du département, Alexis de Jussieu, visite l'église. Il prend conscience du caractère exceptionnel du site. L’église entre alors dans une longue phase de restauration initiée par Prosper Mérimée, inspecteur des Monuments Historiques.
Différentes campagnes de restauration de la nef et des peintures ont été menées au XXè siècle. L’ensemble des efforts de protection est récompensé en 1983 par le classement de l’Abbaye au Patrimoine mondial de l’UNESCO.
Une église abbatiale aux proportions remarquables
Longue de 42 m et haute de 17 m, la nef de l’église abbatiale s’impose par ses volumes exceptionnels avant d’attirer le regard sur ses peintures. Le visiteur est surpris par la hauteur des nefs latérales que l’on ne peut d’ailleurs plusde bas-côtés. Au contraire, ces collatéraux placent l’église parmi la famille des églises dites "halles" autorisant ainsi un bel éclairage intérieur grâce aux hautes baies en plein-cintre.
Au corps volumineux de l'église romane, s'ajoute la silhouette élancée de la flèche de style gothique pratiquement reconstruite au siècle dernier.
À l’élégance de la nef, il faut ajouter la beauté des volumes du chœur de l’église. Éclairé par un étage de fenêtres, disposition assez rare à cet emplacement en Poitou, le chœur se compose d’un sanctuaire profond et surélevé en raison de la présence, en dessous d’une crypte. Ceinturé de dix colonnes décorées de faux marbre comme celles de la nef, il finit d’achever l’homogénéité des formes architecturales de l’église de Saint-Savin.
Le Bâtiment conventuel, témoin de la renaissance de l’Abbaye
Directement relié à l'abbatiale, le bâtiment conventuel est construit en pierres locales. Il est le seul symbole de la vie monastique à Saint-Savin. Le réfectoire est situé au rez-de-chaussée et compte de majestueuses voûtes d'ogives. C’est dans cette pièce que les moines prenaient leurs repas.
La salle capitulaire recevait, tous les matins les religieux pour la lecture des textes sacrés et pour aborder les problèmes de la communauté. Désormais la salle capitulaire accueille la billetterie et la boutique.
Un vaste escalier permettait aux moines de se rendre aisément depuis leurs cellules aux offices du matin et du soir.
À l'étage se trouvent les treize cellules des moines. Le couloir qui les dessert est placé à l'ouest, tandis que les cellules donnent à l'est. Elles sont aujourd'hui un espace d'exposition.
Bâtiment de style néo-médiéval, le logis de l'abbé a été bâti au XVIIe siècle et modifié au XIXe par un natif de Saint-Savin : Félix-Léon Édoux (1827-1910). C'est à cet ingénieur que l'on doit l'intrigante tour crénelée qui reçut le premier ascenseur hydraulique privé. Une invention qui lui permit de s'illustrer lors de l'exposition universelle de 1867. Et c'est grâce à lui que l'on a pu monter au sommet de la tour Eiffel pendant près de 100 ans sans se fatiguer !
Au sens propre comme au sens figuré, les fresques de l’église font corps avec l'architecture qui est leur support. Les peintures se substituent même à l'architecture par le biais du trompe-l'œil. Ainsi, les peintres imitent ce qu'il n'est pas possible de s'offrir : des colonnes en marbre, de la pierre de taille, de la mosaïque, des chapiteaux. Ce sont véritablement ses peintures murales qui ont fait la renommée mondiale de l'abbaye de Saint-Savin.
Des peintures en parfaite harmonie avec les lieux
Ici plus qu’ailleurs, chaque élément iconographique répond à une symbolique précise. L’ensemble des détails et de la richesse unique des coloris ne finissent pas d’étonner les visiteurs.
Sous le porche, couronnant la porte qui mène vers la nef, paroissiens et pèlerins sont accueillis par un Christ triomphant entouré d'anges et d'apôtres. Mais on retrouve aussi le cycle de l’Apocalypse qui, à l'époque romane, était une allégorie de l'expansion de l'Église, de ses combats et de ses joies.
Les parois et la voûte de la tribune haute sont dédiées à la Passion et à la Résurrection du Christ. Toutes ces peintures se voient complétées, sur le berceau de la nef, par une cinquantaine d’épisodes de l’Ancien Testament dont les thèmes ont été empruntés aux livres de la Genèse et de l’Exode.
La beauté du lieu se dévoile aussi sous la surface de la nef, avec les fresques et les peintures de la crypte. Dans cet espace est relaté sur la quasi-totalité des parois, le récit du martyr de Saint Cyprien et Saint Savin. Enfin, les différents prophètes de la foi chrétienne sont représentés sur le sommet des colonnes, tels des piliers de l’Église.
Dans la partie ouest de la nef, un ensemble foisonnant de scènes présente sur un mode narratif les rapports entre Dieu et les Hommes. Dans la partie de la nef réservée aux moines novices, le thème de la séparation est récurrent. Dans celle des moines de chœur au plus près de l'autel, les cycles se font plus longs et évoquent le péché, la trahison mais aussi l'espérance de ceux qui s'unissent à Dieu.
La voûte, un véritable livre d'images
La voûte de la nef représente à elle seule une superficie de quelques 460m². L’assemblage des scènes qui la décorent forme une bande de 168 m de long. Elles relatent différents épisodes de l’Ancien Testament, comme par exemple le récit de la Création du Monde.
La voûte de la nef, support de ce récit, est divisée dans sa longueur par une grande frise. Selon une disposition fréquente en peinture romane, deux registres au nord et deux au sud se déploient de part et d'autre de cette frise. Vers l'est qui évoque pour les chrétiens le soleil levant, la direction de Jérusalem, de la lumière et du Christ, les personnages positifs progressent. A contrario, les personnages insoumis tournent le dos à l'autel et s'engagent vers l'ouest, direction négative de la terreur et de l'obscurité.
D’autres récits bibliques sont représentés sur la nef, à 17 m de haut : l’histoire d’Abraham, de Joseph ou encore d’Adam et Eve.
L'histoire de Noé et sa famille reçoit à Saint-Savin un développement privilégié et original. Une arche en forme de drakkar sans rames ni voiles, à trois niveaux, vogue sur les eaux. Elle contient les représentants d'une humanité déchue que Dieu veut recréer. Mais on aperçoit aussi Dieu instruisant Noé de ses intentions, Dieu bénissant sa famille à la sortie de l'arche ou encore Noé taillant la vigne.
Autre peinture monumentale, la tour de Babel. Elle court sur près de 6 m de long. Deux événements y sont narrés. D'un côté, les hommes s'accordent pour entamer la construction d'une ville-tour dont la taille serait si haute qu'elle atteindrait le royaume de Dieu. De l'autre, la fureur de Dieu qui multiplie les langues mettant ainsi fin à la compréhension au sein du chantier.
On retrouve également des personnages emblématiques. Enoch, patriarche à la longue vie, préfigure l'Ascension du Christ. Le cycle d'Abraham, personnage-clef de l'Ancien Testament, se distingue par sa longueur, le plus long de la nef. Enfin, l'histoire de l'Ancien Testament a été marquée par l'Exode. À Saint-Savin, on y voit l'engloutissement de l'armée de Pharaon lors de la traversée de la mer Rouge, puis les enfants d'Israël accueillis par Dieu et enfin la remise des tables de la loi à Moïse.
Une tablette pour entrer dans l'ère du Moyen Âge 3.0
Mise à la disposition du public dès l’été dernier, la toute nouvelle tablette numérique accompagne les visiteurs dans leur découverte de l'abbaye de Saint-Savin assurant ainsi une parfaite immersion au cœur de l’Histoire.


Saint-Savin, à l'initiative du réseau Abbatia
Fondé en 2014 par l’abbaye de Saint-Savin, le réseau Abbatia a pour mission de développer les liens historiques forts entretenus depuis des siècles entre les différentes abbayes et sites religieux en Nouvelle-Aquitaine. Ces monuments ont toujours été propices au développement culturel et artistique. Ce réseau s’inscrit dans cette lignée en proposant tout au long de l’année différentes activités : conférences, formations de médiateurs, spectacles… Aujourd’hui, cette association regroupe 15 membres.
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En savoir plus https://www.abbaye-saint-savin.fr/
Crédit Photo EPCC Abbaye de Saint-Savin-sur-Gartempe et Vallée des fresque