Valérie Champigny : artiste plasticienne

L'artiste plasticienne Valérie Champigny présente une production restituant un an de résidence sur la réhabilitation du Palais de Justice de Bazas. L’exposition est présentée dans la Salle d’expression du Polyèdre, nouveau Pôle de l’image, de l’écrit et du numérique à Bazas, du 19 au 30 octobre.

Valérie Champigny au Polyèdre, un imaginaire aux multiples facettes.
Valérie Champigny au Polyèdre, un imaginaire aux multiples facettes.

Une œuvre pérenne au Polyèdre de Bazas

Valérie Champigny a présenté le 5 octobre, lors de l’inauguration du Polyèdre de Bazas, un premier état de restitution de sa production sur la mutation de l’ancien Palais de justice. La Mairie de Bazas a souhaité donner une visibilité particulière au travail photographique et d’installations de la plasticienne dans la Salle d’expression. Une œuvre pérenne, une anagramme en néon, a notamment fait l’objet d’une acquisition par la Mairie.

Néon anagramme Bazas V ChampignyAnagramme en néon - V.Champigny.

L’anagramme en néon est associée au fauteuil du juge et installée dans l’espace « Motivé » du Polyèdre, à l’emplacement de l’ancienne Salle du conseil. La phrase ouverte « L’étais-je disculpé•e à ? » compose l’anagramme de « Le Palais de justice », au sein de laquelle Valérie Champigny a pris la liberté d’ajouter un « e » inclusif, sans quoi l’artiste n’aurait pu habiter le message. Facette supplémentaire, on peut aussi y voir une allusion au roman de François Mauriac, « Thérèse Desqueyroux », qui débute par un non-lieu au tribunal de Bazas.

Au travers de cette anagramme, c’est aussi le Palais de justice que l’on « disculpe » à devenir un lieu de culture. Le néon a d’abord été symboliquement installé dans le cachot, avant que celui-ci soit comblé. La phrase comme inachevée demande à être complétée par un verbe, au choix du visiteur. L’artiste, par cette dimension participative, sous un message lumineux, nous incite à nous affranchir des limites morales qui entravent notre liberté. Elle nous convie à tendre vers une émancipation, à jouir des savoirs et des cultures qui jalonnent aujourd’hui le Polyèdre afin de mieux nous découvrir nous-même.

Le Polyèdritem, une création éphémère pour l’inauguration

Valérie Champigny a surpris le jour de l’inauguration par son « Polyèdritem » qui, installé sur l’esplanade Saint-Sauveur devant l’ancien Palais de justice, a généré divers questionnements sur la forme géométrique. L’artiste avait mis en tension des lignes de couleurs entre les différents sommet de son polyèdre irrégulier de quatre mètres de haut, une manière d’évoquer la dynamique des flux d’informations qui circulent maintenant dans ce nouveau Pôle bazadais.

L’artiste, l’imagination en éveil, a créé un signe efficace et changeant lorsque l’on dépasse son point de vue. Le maire a souligné l’« heureuse coïncidence » grâce à laquelle Bazas a invité cette artiste. Valérie Champigny explique : « Je n’illustre pas le Polyèdre de Bazas, je travaille sur cette forme depuis une vingtaine d’années, elle est pour moi un outil de transformation, de mutation ». La plasticienne précise qu’elle s’intéresse essentiellement aux polyèdres irréguliers, et que cette fascination lui est venue à l’adolescence, lors de la découverte de la gravure « Melencolia » d’Albrecht Dürer (1514).

Le Polyèdritem. V.Champigny. Crédit photo PLLe Polyèdritem. V.Champigny. Crédit photo PL

Les fantômes du Palais de justice

Si la plasticienne dessine en 2018 un polyèdre sur une parcelle de 3 000 m2 « Owiiig, le polyèdre à visage humain », taille des polyèdres dans la pierre, les soude pour jouer de leurs ombres ou pour en faire des constellations, elle a aussi intégré des polyèdres et autres éléments lors de performances collectives ou individuelles durant les travaux de l’ancien Palais de justice.

Durant sa résidence, elle a en effet mobilisé une douzaine de volontaires curieux de participer à cette performance collective expérimentale. Il s’agissait d’habiter le lieu, d’y faire ressurgir des scènes fantomatiques du tribunal. On connait la présence de l’héroïne de Mauriac sur les marches de ce Palais de justice, mais l’imaginaire du petit groupe s’est laissé porter au cours des déambulations par une bande sonore préparé par la plasticienne pour donner naissance à une vidéo et une série photographique qui étrangement associent une part documentaire et fictionnée. On y trouve par exemple la présence d’une profusion de codes civils, une pomme, sans doute empoisonnée, ou d’un chien d’une très grande taille sur le bureau du juge.

Autres projets collectifs bazadais

Valérie Champigny présentera un projet d’écriture créative réalisé avec une classe de cinquième du Collège Ausone de Bazas accompagnée par l’enseignant Henry Valles et initié par la Grande Passerelle favorisant l’intervention des artistes. La plasticienne a animé des ateliers d’écriture en classe, puis les élèves par petits groupes se sont rendus en extérieur pour installer des phrases avec de grandes lettres de zinc posées sur le sol. Et c’est une série de photos aériennes englobant l’écrit et le paysage qui sera présentée.
→ Lien édition Mutuum en ligne : https://urlz.fr/aLHE

Projet « Les mots en herbe » - Collèges de Bazas et Cudos.Projet « Des mots en herbe » Collège Ausone de Bazas et Collège de Cudos.

Durant le temps de résidence au Palais de justice, la plasticienne a été retenue dans le cadre des appels à projets du Pôle Culture et Santé Nouvelle-Aquitaine pour une résidence au Centre hospitalier de Bazas, qu’elle a intitulé « L’Emer-veilleur ordinaire ». Une partie de la production de cette résidence sera présentée dans la Salle d’expression du Polyèdre, notamment des récits liés aux rencontres avec les patients de trois services de gériatrie.

 Résidence « L’émer-veilleur ordinaire » - Valérie Champigny - Centre Hospitalier de Bazas. Résidence « L’émer-veilleur ordinaire » - Valérie Champigny - Centre Hospitalier de Bazas.

Une pratique contemporaine impliquée Valérie Champigny est née en 1972 en Touraine. Elle est diplômée de l’École Supérieure des Beaux-Arts de Bordeaux en 1996. Depuis son cursus de cinq années au Beaux-Arts, elle s’intéresse aux formes fractales, aux rhizomes, aux fonctionnements des écosystème géographiques ou sociaux… Elle conduit depuis un travail singulier, contextuel, qui relie spatialité et langage. Sa pratique se fonde sur une expérience d’observation quasi-anthropologique des organisations collectives, des attitudes, des territoires. Son œuvre se présente sous forme de dispositifs, installations ou sculptures, photographies, propositions d’actions collectives. En 2001, Valérie Champigny s’installe dans le Sud-Gironde et centre sa pratique sur des actions participatives associant l’environnement proche et l’écriture, tout en participant à diverses résidences artistiques en Nouvelle- Aquitaine. Valérie Champigny a fondé l’artothèque Mutuum et est auteure de portraits d’artistes sur Marge de Manœuvre sur Rue89 Bordeaux.

Site de l’artiste : www.valeriechampigny.com

Crédit Rédactionnel Thomas Laurens