À la demande du roi d'Angleterre pour répondre aux suppliques des Bordelais en révolte contre les « envahisseurs français », il prend la tête d'un petit corps expéditionnaire dans le but de libérer Bordeaux et l'Aquitaine.
Le 22 octobre 1452, le général Talbot à la tête d’une armée de 4.000 soldats arrive au pied des murailles de Bordeaux. Sans coup férir Talbot, acclamé par les Bordelais, s'empare de la ville. L’armée française s’enfuit dans un désordre indescriptible à la plus grande joie des Bordelais qui surnomment leur sauveur : le roi Talbot. Les Anglais reprennent presque toutes les villes aux alentours de Bordeaux.
Henri VI donnant à Talbot lépée de connétable de France Poems and romances 1445
Du 15 au 21 janvier 1453, 26 bateaux arrivent d'Angleterre pour réapprovisionner leurs troupes en armes et en nourriture.
Le roi de France, Charles VII, furieux de la trahison des Bordelais, ouvre une nouvelle campagne. En 1453, les troupes royales fondent sur Bordeaux, elles se composent de cinq corps d'armée. Jean Bureau, qui commande les armées françaises du Nord s'empare de la place forte de Montravel et fait décapiter tous les défenseurs de la ville, sans jugement sitôt leur reddition. En juin 1453, l'artilleur du roi de France s'empare de Chalais, Bergerac, Cadillac, Blaye, Libourne et Saint-Émilion et au final installe son artillerie sur les hauteurs de Castillon.Talbot offrant un livre à la reine dAngleterre enluminure British LibraryShrewsbury Book f.2 Talbot Dog
Talbot hésite à sortir de Bordeaux. À contrecœur, poussé par les Bordelais il part le 13 juillet 1453 pour défendre le château de Castillon tenu par les Anglais. Talbot avec sa troupe franchit la Dordogne à Libourne, s'empare de Fronsac et, au lever du jour, le 17 juillet arrive en vue de Castillon. Il met en déroute une garnison d'archers français postés dans le prieuré de Saint-Florent, avant-poste de Castillon, mais il ne les poursuit pas. Son arrière-garde, les troupes gasconnes et son artillerie ayant pris du retard sont encore en chemin.
Talbot pense que sa réputation de grand stratège militaire peut suffire à faire lever le camp aux Français. En effet, un habitant lui signale qu'un nuage de poussière aperçu au-dessus du casernement royal laisse à croire que les Français se replient. Talbot franchit la rivière la Lidoire et, bannières en tête, se lance avec ses cavaliers à l'assaut du camp de Jean Bureau.
En réalité, le nuage de poussière est une supercherie. Les Français sont bien en place derrière leurs 300 canons, collés roue contre roue et qui, desservis par 700 manœuvriers, déversent un déluge de feu sur les soldats anglo-gascons. Un vrai massacre ! Cavaliers et chevaux jonchent le sol. Talbot et son fils continuent à se battre héroïquement, parviennent jusqu'à l'entrée du camp français. La bataille aurait pu être gagnée sans l'irruption sur leur flanc des 1.000 cavaliers du duc de Bretagne dissimulés derrière la colline.
Un boulet de canon atteint la monture de Talbot qui tombe à terre. Talbot, couché à même le sol, le fémur brisé, est sauvagement tué à coup de hache par un mercenaire à la solde des Français. Son fils qui n'a pas voulu le quitter subit le même sort. Ce n'est que le lendemain que le corps de Talbot, reconnu par son héraut, sera transporté dans la chapelle du Pas de Rauzan.
Bataille de Castillon Talbot mort de Talbot miniature Martial dAuvergne BNFil
La bataille de Castillon a frappé l’esprit des contemporains parce qu’un grand homme, respecté de tous, même de ses ennemis, nommé connétable de France, le général Jean Talbot y est mort. En 1870, la Société française d'archéologie décide de construire un monument en mémoire de Talbot à la place du seul mur de la chapelle encore debout.
1453, la fin de la commune libre de Bordeaux
9 octobre 1453, signature par Charles VII du Traité de capitulation de la ville de Bordeaux ou la mort de la commune libre de Bordeaux
La défaite de Castillon considérée, par certains, comme la fin de la guerre de Cent Ans sonne le glas de la commune libre de Bordeaux. Avec les nobles soumis ou exilés, les bourgeois ruinés, les religieux asservis, le peuple réduit au silence, voici Bordeaux livrée pieds et poings liés au pouvoir royal français.
Noblesse, clergé, tiers état, les trois ordres impitoyablement punis
Les milieux ecclésiastiques bordelais qui ont soutenu la cause anglaise en payent les conséquences ; Pierre du Tasta, le doyen de Saint-Seurin, banni, s’établit à Londres. Le monastère de Sainte-Croix lui aussi change de main. La noblesse est rudement frappée. Les seigneurs gascons, alliés des Anglais, morts au combat ou exilés, laissent châteaux et propriétés. Le roi récompense ses fidèles et particulièrement les seigneurs bretons en redistribuant les biens saisis. Une véritable curée s'instaure sur toute l'Aquitaine. La bourgeoisie commerçante perd ses privilèges. Désormais, toutes les taxes sont prélevées au profit du roi et la monnaie bordelaise est dévaluée.
Fausse promesse de Charles VII
Le roi de France déclare "laisser aux Bordelais l'administration de la cité, comme au temps passé". Hélas, la réalité va se révéler bien différente. Une répression féroce s'installe. Toutes les juridictions sont supprimées et rattachées directement au Parlement de Paris, y compris la jurade. L'Université perd son indépendance. La société féodale fait place à un état centralisateur au pouvoir de plus en plus absolu. Dorénavant, ce sont les conseillers du roi qui gèrent la ville. Toute la région est ravagée par les guerres, les vignobles sont anéantis. Pour la première fois, personne ne vendange à l'automne 1453.Bataille de Castillon Mort de Talbot Alex Mazas 1852
Les pauvres habitants de Bordeaux, le visage ravagé par la famine, maigres et mal vêtus, craignent pour leur survie. Charles VII qui dédaigne Bordeaux et ne vient pas saluer ses nouveaux sujets, déclare cependant prendre en pitié "le pouvre peuble" et demande "miséricorde et compassion de préférence à une justice hâtive".
Il promet même un travail "payé" pour la future construction des châteaux du Hâ et Trompeyte. Après quatre tentatives de négociations, les Bordelais subissent une amende de 100.000 écus que Pey Berland toujours en fin négociateur fait réduire à 30.000 et obtient également le rétablissement de la jurade. Le roi de France se réserve le choix du maire, du clerc de ville et de cinq jurats.
En toute logique, Charles VII récompense son maître artilleur Jean Bureau, auréolé par sa victoire et le renomme maire de Bordeaux.
Désormais, la Guyenne fait, militairement et administrativement, partie du royaume de France. Tous les liens avec l'Angleterre sont rompus. L'océan Atlantique devient une frontière du royaume de France que seuls quelques navires marchands peuvent franchir. L'avenir de Bordeaux semble bouché.
Les deux chefs de la résistance bordelaise, Bernard Angevin et Pierre de Montferrand, rebelles aux Français, subissent un sort différent. Le bourgeois Bernard Angevin accepte de rallier Charles VII et conserve ses seigneuries.
Pierre de Montferrand, de retour en Guyenne, "est pris, jugé, condamné, décapité sur le champ, écartelé, mis en pièces et pendu en divers lieux".
En Angleterre, la guerre de succession des Deux Roses sévit entre les familles Lancastre (rose rouge) et York (rose blanche). Ce conflit anéantit tout espoir pour le roi d'Angleterre d'intervenir pour récupérer l'Aquitaine.
Blason John TalbotAdichats, adieu !
En 1453, le gascon cesse d'être la langue officielle. Le roi Charles VII fait rédiger les lettres patentes en français dans la province conquise. Le parler gascon résiste. Les registres des paroisses continuent à être écrits dans le langue locale.
L'exil ou la mort
Beaucoup de nobles et bourgeois, atteints dans leur honneur et dans leurs biens, choisissent l'exil en Angleterre. Pratiquement ruinés par les événements, ils tentent de fonder une colonie française outre-Manche, par le commerce du vin, de la laine ou la vente des armes. Le sort des familles, plus de 200, fuyant l'Aquitaine par peur de représailles, va être très variable. Certains exilés obtiennent des pensions ou des charges diplomatiques, d'autres deviennent citoyens de Londres comme le curé de Saint-Seurin, Pey de Tasta, ou rentreront au pays après l'amnistie.
HISTOIRE DE BORDEAUX

L’association culturelle éditrice "Les Dossiers d’Aquitaine et d’Ailleurs" et son équipe rédactionnelle, à l’occasion de son quarantième anniversaire, va publier une Histoire de Bordeaux, en six volumes, intitulée "D’Ausone à Mauriac, de l'Antiquité à nos jours, 2000 ans d’Histoire par les personnages qui se sont engagés pour que vivent libres Bordeaux et la Guienne".

Crédit Rédactionnel Les Dossiers d’Aquitaine