Le Carnaval pyrénéen aborde plusieurs thèmes de façon récurrente : la question des cycles, l’imaginaire pyrénéen, la langue occitane, la révolte éphémère et métaphorique. Son rayonnement dépasse le strict cadre local.
Carnaval Biarnés, qu'ei aquò ?
A partir de l’Aragon, il traverse les villages béarnais pour rejoindre la capitale Pau. Il est un moyen d’échange et de valorisation du patrimoine culturel et linguistique. Il concerne aujourd’hui toute une région et même au-delà. Le Carnaval Biarnés, un des cinq plus grands carnavals de France métropolitaine, existe depuis bientôt 40 ans. Il se fait tous les ans à Pau (64) et ses festivités s'étalent sur plusieurs jours. Carnaval est une fête populaire qui fait sens dans le monde entier mais qui se décline dans chaque endroit avec ses singularités. C’est le cas du Carnaval pyrénéen avec son panthéon, sa liturgie, ses lieux.
Son panthéon avec : le roi Sent Pançard, son épouse Caronha, Quaresma (Carême), les ours, les gendarmes… Sa liturgie et ses lieux avec la chasse à l’ours dans le centre historique, la Sèga (entrée de Carnaval dans la ville), la remise des clefs sur la Place royale, le procès devant le Tribunal et la crémation.
Cette identité forte est un trésor commun mais c’est surtout un point de départ : pour que vive cette identité, il faut la confronter aux autres cultures et champs artistiques. La culture béarnaise ne doit pas être gardée dans le formol, elle est un creuset culturel et un espace dynamique au service du vivre-ensemble.
Le thème 2023 : "bohar" - "souffler"
Comme chaque année, le Carnaval Biarnés s’est donné un thème sous la forme d’un verbe. En 2023, ce sera « bohar », « souffler » après une période entrâvée par un virus respiratoire, qui a bien failli avoir raison de Carnaval Biarnés et que les bénévoles ont traversée avec vaillance et détermination.
Souffler, comme pour marquer un temps, au milieu des crises qui s’enchaînent en en plus finir, pour, tous ensemble, se poser et profiter d’une respiration festive et collective pour se lâcher. En effet, le Carnaval Biarnés est un moment de lacher-prise collectif où l’on purge par la caricature et la fête tous les soucis qu’on a accumulés pendant l’année, tout ça pour trouver un second souffle afin d’affronter le quotidien. Traditionnellement, il est beaucoup question dans le carnaval pyrénéen de dernier souffle également. Ce dernier souffle qui – peu de gens le savent – ne sort pas vraiment par la bouche.
On comprend souvent la présence de la flatulence dans Carnaval comme une grivoiserie vulgaire et facile, mais c’est – sans mauvais jeu de mots – beaucoup plus profond. Le pet est certes la conséquence physiologique normale de l’alimentation riche de cette période de l’année mais est aussi considéré comme un souffle de vie, c’est le dernier souffle de vie : le personnage de l’ours pète une fois tué lors de la nuit de l’ours, mais il revient du monde des morts, encore et toujours, quand on lui souffle dans l’arrière- train. Voilà pourquoi on peut voir cette année sur l’affiche de Carnaval un Sent Pançard sous les traits de Cartoon, entre les trois petits cochons et le diable de Tazmanie, qui répand la vie, le souffle par tous les moyens, les plus hauts comme les plus bas.
Enfin, ce thème peut être compris comme un hommage à une définition faite par l’équipe de Carnaval Pantalonada dans les années 90 :
Carnaval c’est : Souffler
Danser et chanter jusqu’à épuisement
La gentillesse, l’humour et la tolérance
S’habiller en femme si l’on est un homme
S’habiller en homme si l’on est une femme
Se masquer et changer de voix
Dénoncer l’injustice, les maîtres du monde
Faire râler les pisse-vinaigre, les gens bien
Se débrider, se rebeller, laisser libre cours à sa fantaisie,
Montrer sa fierté d’être béarnais que l’on soit né ici
ou ailleurs