La Ville de Biarritz rend hommage à Pier à travers une grande rétrospective à la crypte Sainte-Eugénie. Disparu en 2019, cet artiste biarrot laisse une œuvre riche, variée, consacrée avant tout au Pays basque. A l’instar de son mentor le peintre régionalise Ramiro Arrue, Pier occupe désormais une place de choix dans le patrimoine artistique basque. Ses compositions colorées et déstructurées, bien connues du grand public, illustrent les grands thèmes de la vie collective de façon intemporelle.
Pier a réalisé des créations graphiques pour de nombreux événements : affiches pour des fêtes locales, tournoi de pelotes, de golf, chœur d’hommes, mais également logos, objets (boîtes de macarons), ou des œuvres de décoration comme des vitraux.
Cette rétrospective à Biarritz offre enfin l’opportunité de redécouvrir cet artiste singulier plutôt discret, sa dernière grande exposition remontant à 2004, au Musée basque et de l’histoire de Bayonne. Un catalogue sera réalisé à cette occasion.


PIER, l’artiste de l’équilibre
Lorsque je fis la connaissance de Pier à son atelier, pour préparer au Musée Basque son exposition « Pier peintre de l’âme basque » en 2004, je découvris autant un artiste qu’une personne extrêmement attachante tout en sensibilité et en discrétion.
J’ai alors essayé de montrer combien le peintre Pier était passionné par la composition de sa toile où tous les éléments devaient correspondre entre eux. Il recherchait l’équilibre du dessin et des couleurs mettant en valeurs des aplats répartis sur des plans successifs.
Il privilégiait le jeu monumental des formes. Curieusement, il ne détaillait pas la figure humaine de ses sujets par pudeur. Lorsque la figure intervenait, elle demeurait anonyme et l’artiste l’obligeait à se fondre dans la composition d’ensemble.
Ainsi, les hommes et les femmes de Pier sont anonymes et intellectualisés à outrance puisqu’ils n’interviennent qu’à titre de correspondance des formes et des couleurs. La succession des plans et l’opposition balancée des formes et des couleurs apportent une note faussement primitive.
Surtout dans ses premiers tableaux illustrant son goût pour la géométrie et même l’abstraction, le calcul mathématique l’emportait sur la spontanéité. L’artiste se sentait plus libre dans l’utilisation du pastel où un effet de matière et de transparence rappelait ses recherches de jeunesse où il se laissait aller davantage à l’impulsivité.
L’art de Pier est très réfléchi et nécessite une longue méditation pour être compris dans toute sa richesse. Le motif ethnographique, basque, africain ou autre est un prétexte dont la répétition ne doit pas dissimuler la complexité de la recherche. A première vue, ces séries d’images convenues du folklore et du paysage basques font croire à un art d’illustrateur ou d’affichiste dont on verrait bien les œuvres traduites en tapisserie ou en vitrail dans un souci décoratif. Mais la vérité de Pier est ailleurs. Sa première formation de typographe l’ayant rendu sensible à la mise en page, son talent d’artiste est dans le calcul savant des correspondances visuelles soutenues par le dessin et la couleur traités en ligne simple et en zones franches d’ombre et lumière. Il en ressort un art monumental immédiatement perceptible dans les petits formats où la succession d’aplats colorés crée du volume et de la force. L’art de Pier est proche d’une abstraction géométrique où se dissimulaient la timidité et l’humilité d’un peintre très aimable mort bien trop tôt, bien avant son père, autre artiste dont le fort caractère pouvait paraître écrasant à un fils qui pourtant fit son chemin avec originalité et talent.
Olivier RIBETON - Conservateur en chef honoraire du Musée Basque et de l’histoire de Bayonne
Repères biographiques
Pier est né dans la maison familiale à Anglet, le 6 juin 1950.
Etudiant à Bordeaux, il acquiert en 1968 son diplôme de typographe et commence à travailler comme peintre en lettres.
AUTOPORTRAIT - 2015 - Collection privéeEn 1974, il rencontre son épouse Annie et après un voyage à Londres, fasciné par la peinture de Turner découverte au British Museum, il décide de se lancer dans une carrière de peintre.
Il réalise ses premières toiles à l’atelier de son père à Anglet, le peintre Baldi.
En 1977, il ouvre sa première galerie à Saint-Jean-de-Luz où il commence à vendre ses toiles A partir de 1980, il s’installe à la galerie de la Maison de l’Infante où il exposera jusqu’en 2014.
Dès les années 80, Pier expose dans de nombreuses galeries en France et Espagne. Il réalise plusieurs expositions individuelles notamment au Musée Toulouse Lautrec à Toulouse (1981), au Domaine de Trévarez dans le Finistère (1991), à la Galerie des Orfèvres à Paris (2000), au Palacio de Pimentel de Valladolid (2002) ou encore au Musée Basque de Bayonne (2004).
Durant toute sa carrière, il restera attaché à son atelier de Biarritz où il réalisera la plus grande partie de son œuvre.
En 2018, il présente sa dernière exposition avec son fils photographe, Bastien, à la Benoiterie d’Arbonne.
Il décède le 7 mai 2019 après une vie consacrée à la peinture et au dessin.
CRYPTE SAINTE-EUGENIE - Place Sainte-Eugénie Ouvert tous les jours du 17 décembre au 29 janvier 2023 de 14h à 18h30. Fermé le mardi, le 25 déc. et le 1er janvier 2023 - ENTREE LIBRE - |


Images extraites du catalogue de l'exposition © Éditions kilika / © Pier