Le divin nectar bordelais réunira-t'il Nemorino et Adina au Grand-Théâtre ? Au public de le découvrir du 1er au 10 avril, dans cet Elixir d'Amour à la mise en scène impressionnante signée Adriano Sinivia, sous la direction de Nil Venditti...
Parmi les artistes à découvrir dans cette production qui nous vient tout droit de l'Opéra de Lausanne : Kevin Amiel, que vous avez pu découvrir dans La Traviata à la rentrée 2020 à Bordeaux, qui interprétera Nemorino en alternance avec Yu Chao, lauréat du Concours Bordeaux Médoc lyrique, Golda Schultz qui fait sa prise de rôle en Adina avant de reprendre ce rôle sur scène au MET à New York, en alternance avec Catherine Trottmann, qui a triomphé à l'Opéra de Limoges dans L'Enfant et les sortilèges...
Opéra
Production Opéra de Lausanne
Melodramma giocoso en deux actes créé le 12 mai 1832 au Teatro della Canobbiana de Milan.
Musique de Gaetano Donizetti - Livret de Felice Romani.
Donizetti a écrit plus de 70 opéras, dont cet Elisir d’amore créé à Milan en 1832, qui remporta un succès immédiat. L’air fameux offert au héros Nemorino – « Una furtiva lagrima » – allait devenir un incontournable du répertoire pour ténor, et l’élixir se révélant être... du vin de Bordeaux ! Une double distribution sera à découvrir sur la scène du Grand-Théâtre avec, dans le rôle du jeune paysan amoureux, Kévin Amiel (récent Alfredo à Bordeaux dans La Traviata) et Yu Chao, lauréat du Concours Bordeaux Médoc lyrique. Ils rivaliseront de doux sentiments pour la fermière ingénue Adina campée en alternance par Golda Schultz et Catherine Trottmann. Le tout sous la direction musicale et scénique d’un duo italien passionné par ce répertoire : la cheffe d’orchestre Nil Venditti et le metteur en scène-chorégraphe Adriano Sinivia.
Entretien avec Kevin Amiel
Nemorino n’est pas juste un personnage idiot épris d’amour. C’est avant tout quelqu’un qui suit le fil de ses émotions au premier degré, sans filtre ni retenu, et en ce sens il me ressemble beaucoup...
Vous retrouvez le rôle de Nemorino à Bordeaux après une prise de rôle à Toulouse : comment vivez-vous ce « retour » à l’Élixir d’Amour ?
L’Élixir d’Amour est un spectacle qui a une saveur toute particulière pour moi. J’ai fait ma prise de rôle (Nemorino) à Toulouse – ma ville d’origine - il y a exactement deux ans, en mars 2020, sous la direction de Sesto Quatrini. Ce fut ma toute dernière scène avant le confinement. Et aujourd’hui, à l’heure où « les masques tombent » et où l’on retrouve enfin une connexion entière avec le public, je reprends ce rôle à Bordeaux, mon autre ville de coeur, exactement à la même période. C’est comme si les choses s’étaient arrêtées à un endroit et devaient reprendre à un autre, pour boucler la boucle et regarder enfin devant.
Comment décririez-vous « votre » Nemorino ?
Cela peut paraitre étrange, car de prime abord il peut sembler très candide, mais Nemorino est un rôle qui me ressemble beaucoup. Il n’est pas juste un personnage idiot épris d’amour, que l’on peut percevoir en première lecture. C’est avant tout quelqu’un qui suit le fil de ses émotions au premier degré, sans filtre ni retenue, qui vit les choses comme elles arrivent. Il a un côté presque enfantin, tout comme moi, il aime s’amuser et prendre la vie comme elle vient. Je trouve aussi ce personnage très poétique et haut en couleurs.
À quoi s’attendre pour ce Nemorino à l’accent bordelais ?
C’est un personnage très touchant, il doit donc être joué de façon à ce que le public comprenne ses joies comme son désarroi. Pour ceux qui m’ont découvert une première fois en Nemorino à Toulouse, je dirais qu’ils retrouveront à Bordeaux cette lecture toute personnelle du rôle, mais dans une mise en scène proche d’un univers fantastique qui renforce la naïveté et le caractère enfantin du personnage. Adriano Sinivia plonge l’Elixir d’Amour dans un décor gigantesque, un peu façon « Arthur et les Minimoys », justifiant d’autant plus la méconnaissance de Nemorino sur le monde. Et puis, aussi petit, il est ivre beaucoup plus vite ! Cela a du sens...
Quel est votre passage préféré ?
Le quatuor final de l’Acte 1. Ce n’est pas une scène comique : Nemorino, désespéré de voir Adina accepter si rapidement la demande en mariage de Belcore, la supplie d’attendre le lendemain. En effet, l’élixir d’amour qu’il a bu – qui est en fait du vin de Bordeaux ! – n’est censé faire effet qu’au bout de 24h et il comptait attendre ce délai pour lui fixer rendez-vous et la séduire. Cette longue phrase, triste et mélancolique, vient rompre le rythme joyeux de la partition : « Adina, credimi, te ne scongiuro ».
Vous partagez la scène avec de nombreux autres talents. Vous nous racontez ?
L’équipe de cet Élixir d’Amour bordelais est formidable. Côté interprètes, nous nous connaissons tous déjà beaucoup, ce qui crée une belle énergie sur scène. Le double cast est très intéressant : j’ai la chance de donner la réplique à Golda Schultz en Adina, en alternance avec Yu Shao et Catherine Trottmann dans la deuxième distribution. Ils sont incroyables et apportent eux aussi leur singularité aux personnages. Nil Venditti, à la direction musicale, a une énergie débordante. C’est très stimulant de travailler avec elle. Elle sait ce qu’elle veut et où elle va, mais elle laisse aussi toute sa place à nos propositions. Le metteur en scène, Adriano Silivia, nous fait aussi l’honneur d’assister aux répétitions, et nous permet également cette liberté d’adapter les personnages à nos émotions. Ce sera, à n’en pas douter, un très grand moment que cet Élixir d’Amour pour nous tous !