Bordeaux Confiné - J + 40 - Une autre vision sur la Métropole de Nouvelle-Aquitaine
Ce n’est pas tous les jours que la Métropole de Nouvelle-Aquitaine se retrouve vidée de ses habitants qui se murent dernière les façades de la pierre blonde des façades des belles demeures.
Le chiffre 40 est un marqueur philosophique, spirituel, religieux au sein des textes des trois grandes religions monothéistes (Bible, Coran, Torah) et enfin physiologique associé au remplacement d’une période par une autre. C’est donc 40 jours après l’annonce du confinement, que je vous propose de déambuler virtuellement en quelques clichés dans Bordeaux pour redécouvrir la ville sous un nouvel angle. Serait-ce un signe de basculement, pour une prise de conscience dans ce monde quelquefois déboussolé ?


Photographier le vide est un paradoxe auquel je n’avais jamais été confronté. Un des objectifs que je m’étais fixé était de retranscrire et de partager l’atmosphère lourde et pesante des lieux les plus emblématiques de la cité UNESCO, à des moments distincts et sous des lumières différentes.
Telle une ville fantôme, Bordeaux m’est apparue méconnaissable en offrant un spectacle surprenant, oscillant entre tranquillité absolue et désolation.



Étonnamment, cette situation unique de confinement provoque des scènes plutôt surréalistes. Tout est étrangement calme et lent. Marquée par l'urbanisme des intendants, puis par Haussmann, Bordeaux est une ville en majesté riche en longues rues rectilignes, autant de prétextes pour lever les yeux et découvrir de grandes perspectives …



A l’heure matinale où Bordeaux commence sa journée, c’est le vide. Seuls les quelques joggeurs trottinant dans rues, quelques employés municipaux dont les activités de nettoyage ne peuvent pas s’effectuer en télétravail, quelques malheureux et sempiternels sans domiciles fixes demeurant encore et toujours en marge des exigences de confinement, et bien entendu quelques policiers présents en patrouille aux endroits stratégiques pour des contrôles, battent le pavé.
Mes sens ne sont pas surmenés. L’air est même agréable à respirer. Les oiseaux sont actifs en reprenant la pleine possession de la ville et de ses espaces verts. De ce point de vue, le confinement aura au moins eu un point positif vis-à-vis de l’environnement. La nature n'est en effet pas confinée… Elle n'attend pas pour pousser …. Il est vrai que la végétation est en plein déconfinement printanier après un hiver remarquablement doux et tempétueux.
Hormis les gazouillis des oiseaux, le silence anachronique ne coïncide pas avec l’esprit des lieux. Les rues d’habitude bondées se sont muées en désert urbain où le minéral impose son empreinte.



Mes sentiments se partagent entre le plaisir de sortir de ce quotidien claquemuré dans lequel j’étais enfermé et celui de constater ce Bordeaux qui, même avec le soleil, est devenu triste, comme portant le lourd fardeau des drames qui se déroulent au niveau planétaire.



Je marche seul. Humble …. Humain dans une ville éteinte, abandonnée, délaissée. Je perçois le même sentiment que celui que l’on éprouve l’hiver en marchant sur le front de mer des stations balnéaire de la Côte océane.



Comme si j’avais peur de troubler la quiétude des lieux en réveillant les mauvais esprits qui m’ont plongé dans ce monde irréel, je me prends à murmurer les paroles d'une chanson de Francis Cabrel ‘’on doit -être hors saison’’….


Cette frayeur passagère estompée, je me raccroche à mon objectif premier, à savoir, immortaliser la sérénité de ces moments qui peuvent, si l’on si attarde un instant, constituer une formidable opportunité de reconstruire un monde qui ne tournait plus rond. Nous le savions, mais nous faisions tout pour ne pas le voir.


J’ouvre les yeux en me prenant à imaginer et à rêver d'un autre monde. Le confinement se prête à cette phase de reconstruction, comme si cette période de ralentissement forcée, cette léthargie dans laquelle la ville est plongée, pouvait avoir quelques conséquences positives sur nos habitudes de vie et nous donnant envie de changer la ville, pour la rendre simple et frugale, en replaçant l’humain comme l’église au centre du village.


De Burdigala la romaine, au Bordeaux du XXIème siècle, c'est une succession d'invasions, de sommeil, de prospérité, de résistance, de résilience, de métamorphoses, d'embellissent et d'expansion qui ont fait cette ville épanouie, vivante et expansive que nous connaissons habituellement.


Puissent ces images d'un Bordeaux figé, à l’aube du 40ieme jour, vous procurer les sensations et les sentiments introspectifs que j'ai éprouvés en les réalisant.