“Murmansk” by Ettore Sottsass 1982 / “Roma” by Marco Zanini 1986 / “Kyoto” by Shiro Kuramata 1983 / “Ginza” by Masanori Umeda 198
Photo Credit Studio Azzurro
La saison culturelle qui a démarré à Bordeaux en juin 2019 a pour thème la Liberté. Le musée des Arts décoratifs et du Design (madd-bordeaux) y participe en accueillant dans l'ancienne prison l'exposition Memphis - Plastic Field, présentée en 2018 à la Fondation Berengo en marge de la 16ème édition de la Biennale d'architecture de Venise.
Ettore Sottsass fonde la Memphis en 1981, fédérant autour de sa forte personnalité déjeunes architectes qui rêvent de faire voler en éclats les codes de la modernité et du rationalisme ; la culture qu'ils mettent en place est une réaction vitaliste et instinctive face à l'embourgeoisement du design. Leur première collection est exposée à Milan.
“Imera” by Ettore Sottsass 1986 / “Colorado” by Marco Zanini 1983 / “First” by Michele De Lucchi 1983
Photo Credit Studio Azzurro
“Bay” by Ettore Sottsass 1983 / “Sirio” by Ettore Sottsass 1982 / “Clesitera” by Ettore Sottsass 1986
Photo Credit Lucien Schweitzer Galerie et Editions
L'exposition, qui ouvre le 18 septembre 1981, fait l'effet d'une bombe dans le paysage européen du design. Elle renouvelle radicalement le langage des formes et des couleurs, fondé dès lors sur le sens et la présence de l'objet, plutôt que sur sa fonction. Affiche exposition - © IB Studio - Madd-BordeauxAutour d'Ettore Sottsass. se réunissent des artistes de toutes nationalités parmi lesquels les deux Bordelaises Martine Bedin et Nathalie Du Pasquier. Ensemble, ils renversent les principes traditionnels du design et transforment une discipline tournée jusque-là vers la production et la rationalité, pour l'orienter vers la communication visuelle. Ils sont habités par une liberté qui ouvre le champ de tous les possibles.
Une stratégie est mise en place pour acquérir instantanément une notoriété internationale. Ernesto Gismondi - Président de la société Artemide - assure la diffusion de la collection à l'échelle mondiale, offrant ainsi à la Memphis une visibilité essentielle. Les objets sortent du modèle économique habituel pour entrer dans une production illimitée. La bibliothèque Carlton devient une icône du design italien dans le monde. La chaise First de Michele De Lucchi atteint vite le millier d'exemplaires vendus. Quant à la lampe Super de Martine Bedin, c'est encore aujourd'hui un best-seller.
En présentant cette exposition, le madd-bordeaux s'inscrit dans la continuité d'un travail inauguré par Jacqueline du Pasquier, conservatrice honoraire du musée, qui accueillait à Bordeaux en 1983 la première exposition dédiée à la Memphis en France.
“Big Sur” by Peter Shire 1986 – Memphis Milano Collection / Photo Credit Roberto Gennari
“Riviera” by Michele De Lucchi 1981 / Photo Credit Aldo Ballo, Guido Cegani, Peter Ogilvie
"Ashoka" by Ettore Sottsass 1981 / Photo Credit Pariano Angelantonio
Exposer Memphis aujourd'hui, c'est également l'occasion de s'interroger sur l'actualité de cet élan de liberté qui a remis la culture démocratique au cœur des enjeux, qui a réintégré au premier plan ce que la culture d'un design élitiste méprisait, à savoir l'ornement et la décoration, en favorisant également la spontanéité, la sensualité et l'humour. Comme l'écrivait Paris Match en 1983 : « Après Memphis, rien n'a plus jamais été pareil dans l'histoire de la décoration d'intérieure ».
Réunissant plus de 160 œuvres iconiques conçues entre 1981 à 1988, Memphis Plastic Field met en exergue l'esprit irrévérencieux et subversif de ces nombreux jeunes designers. Parmi ces pièces maîtresses, un très bel ensemble d'une trentaine de vases réalisés à Murano.
Le groupe Memphis photographié en 1981 sur le ring Tawaraya conçu par Masanori Umeda (1981) © Studio Azzurro
« Memphis voulut insuffler une nouvelle vie au mot « design » ...Ce qui me séduit dans tous les objets Memphis, c'est leur humour. » Karl Lagerfeld, catalogue de la vente aux enchères de sa collection Memphis, 13 octobre 1991.
« Nous sommes devenus des explorateurs. Peut-être sommes-nous capables de naviguersur des rivières larges et dangereuses et de faire notre chemin dans des jungles où personne n'est jamais allé ». - Ettore Sottsass
“Bordeaux” by Nathalie Du Pasquier 1986 / Photo Credit Roberto Gennari