Grimper virtuellement en haut de la colonne des GirondinsImage HD © AquitaineOnLine.com ( Conseil de visualisation : cliquer sur l'image pour accéder à l'image HD, zoomer sur la partie basse à la base de la colonne puis remonter sur la colonne des Girondins, ...)
Il s’agit de la célèbre colonne des Girondins, dressée sur l’esplanade des Quinconces, qui commémore le martyre de ceux qui ont été à l’origine du grand élan de 1789 entrés en révolution au nom des idéaux des lumières. L’espace, et l’édifice respirent l’histoire et la racontent…
Cet ensemble sculptural qui porte en son faîte « La Liberté » brisant ses chaines, une statue de bronze de 11 mètre visible de nombreux points de la ville, positionné au centre de l’hémicycle de la place des Quinconces, domine magistralement les 12 hectares de la plus grande place d’Europe. Les Trois figures féminines placées du côté de l’hémicycle personnifient la ville de Bordeaux assise sur la proue d'un navire avec une corne d'abondance entre la Garonne et la Dordogne.
De part et d’autre de la colonne trônent deux monumentales fontaines de bronze riches de symboles. La fontaine face au Grand Théâtre montre le triomphe de la République entourée par le travail (un forgeron), la Sécurité avec son glaive et la Force appuyée sur un lion, sur les côtés, des groupes d’enfants incarnent les bienfaisantes lois républicaines sur le Service militaires et l’Instruction publique. Enfin, d’effrayants chevaux reptiles et poissons crachant l’eau par leurs nasaux, repoussent le Mensonge, le Vice et l’Ignorance.
Côté Chartrons, la Concorde avec son rameau d’olivier assure la Fraternité (un bourgeois et un ouvrier se serrant la main) et l’Abondance ; les groupes d’enfants personnifient le Commerce et l’Industrie et les Arts. Les chevaux marins sont précédés par le bonheur représenté par un jeune couple barbottant avec un dauphin.
Ces quadriges aquatiques et leurs allégories expriment depuis 1902 la volonté de la République conquérante de porter au-delà des mers ses idées. Ils eurent un destin particulièrement chahuté. Pendant la seconde guerre mondiale, les fontaines sont réquisitionnées à des fins militaires, leur métal devant être refondu au service de la guerre. En 1942, en effet, la commission à la récupération des métaux non ferreux avait payé l’ensemble de 52 tonnes à 30 francs le kilo de bronze.
On ne les retrouvera, miraculeusement épargnées, qu’en 1944 à Angers avant un retour triomphal de courte durée à Bordeaux en juillet 1945 pour finir abandonnées dans la plus grande indifférence. Ce n’est qu’en 1968 qu’un ancien réfugié espagnol les redécouvre au milieu des hautes herbes au pied du pont d’Aquitaine.
Il faudra la constitution d’une association, de longs combats et une campagne de presse pour que Chaban Delmas, réélu en 1977, consente au retour des Girondins chez eux, après reconstitution du puzzle géant par le musée d’Aquitaine et restauration à l’identique, pendant des mois et des mois, dans les hangars des quais.
Depuis janvier 1983, ceux que nombreux nomment « les chevaux des Girondins » constituent un lieu incontournable du tourisme bordelais du périmètre classé UNESCO. Ils verront bientôt arriver les tramways de la ligne D en provenance de Eysines-Cantinole et plus au-delà Saint-Médard en Jalles à l’horizon 2020.
Où sont les Girondins ?
Bien que dédié aux Girondins, les deux groupes de statues représentant huit des principaux députés tel que le prévoyait le projet initial n’ont jamais été réalisés et leurs emplacements sur le socle de la colonne, en arrière de chacune des deux fontaines, demeurent toujours inoccupés. En 1989, pour le bicentenaire de la prise de la Bastille, une plaque commémorative, gravée des noms de huit députés girondins, est apposée au monument. Les noms retenus étant ceux des huit membres du parti girondin effectivement députés du département de la Gironde.
La gigantesque place des Quinconces
La place des Quinconces ne peut laisser indifférente ni le visiteur ni le passant bordelais. Il est vrai que l’immense quadrilatère est 40 000 m2 plus grand que la place de la Concorde (Paris). Construite entre 1810 et 1828, la grande place bordelaise est une esplanade ensablée qui descend légèrement vers la Garonne. Elle doit son nom aux arbres qui bordent l'allée centrale, plantés en quinconces, quatre en carré et un au centre, comme le chiffre 5 sur un dé.
Certains esprits grincheux vous diront que ce vaste espace vide de 380 mètres large et de 400 mètres de long est un four poussiéreux l’été et un immense bourbier en automne ou lors des giboulées de mars par temps de pluie.
Il suffit de jeter un œil sur un plan de la ville, pour jauger l’emprise de ce vaste espace sur le secteur bâti de la ville loti entre Garonne, quartier des Chartons et cœur patrimonial et commercial du centre-ville. Cette prise de conscience ne fait que renforcer dans l’imaginaire ce que pouvait être une imposante forteresse construite par Charles VII après qu’il eût chassé les Anglais de Guyenne après la victoire de la bataille de Castillon en 1453.
Une forteresse au cœur de la Cité, le château Trompette
Sources Archives Bordeaux MetropoleReconstruite, renforcée, aménagée au fil des siècles, cette citadelle tire son nom de l’ancien quartier de Tropeyte que traversait une source du même nom. Elle avait non seulement un rôle de protection de la ville vis-à-vis d’une nouvelle offensive anglaise, mais encore et surtout, avec ses canons tournés vers la cité, un rôle de contrôle et de mise au pas des habitants de la cité.
Il faut pour comprendre l’évolution de cette citadelle bastionnée se replonger dans l’histoire dans tumultueuse de la ville. En effet, Bordeaux l’infidèle s’était donnée corps et âme au royaume d’Angleterre pendant trois siècles ; Bordeaux la révoltée s’était opposée au pouvoir royal à la suite de la jacquerie des pitauds ; Bordeaux la séditieuse marqua de son seau la révolte de la Fronde. Ceci explique l’origine d’un des plus beaux ouvrages militaires du règne de Louis XIV pour « réprimer les émotions soudaines d’une populace facile à prendre le feu et à se mutiner » selon le constat de Vauban.
Tombée en désuétude, l’imposante forteresse, fut aussi détestée et crainte par ses habitants que ne l’était en son temps la Bastille par le peuple parisien. Elle finit par être détruite en 1818 dans le cadre du grand big bang urbain du XIXème qui donne aujourd’hui à la ville sa blondeur et sa volupté architecturale si prisée des touristes venus admirer son accession au rang de patrimoine mondial.
Pour monumentaliser et théâtraliser l’esplanade du côté de la Garonne, deux colonnes phares d’inspiration antiquisante avec leur décor de rostres de 21 mètres de hauteur pour accueillir les marins, permettent de quitter la place en direction du fleuve. Erigées en 1828, ces proues de navire font référence directe à la puissance sans partage et la maîtrise des mers de la flotte romaine pendant des siècles. Elles ont donné leur nom à ses deux colonnes monumentales : les colonnes Rostralle.
Le temps d’un dernier regard en perspective vers la colonne de marbre blanc présentant sur cette face un Coq Gaulois encadré par deux femmes représentant respectivement l'Eloquence et l'Histoire, et en prenant le recul suffisant pour faire entrer dans l’objectif cet ensemble architectural unique, n’oubliez pas de saluer les deux illustres statues de Montaigne et Montesquieu qui bordent la place. Leur sagesse philosophique ne fait que renforcer la plénitude qui se dégage de l’immensité du lieu qui connut lors du dernier rassemblement populaire du dimanche 11 janvier 2015 une vague humaine de plus de 140.000 personnes selon les chiffres officiels de la préfecture de Gironde pour "Charlie" et la liberté.
Crédits Photos Monuments aux Girondins : © Marc C